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    L'actu vue par REMAIDES : "L'Onusida peut amener 35 pays à mettre fin au sida d'ici à 2025"

    • Actualité
    • 23.04.2024

    chiffres

    © Studio Capuche

    Par Jean-François Laforgerie  

    L'Onusida peut amener 35 pays à mettre fin au sida d'ici 2025

    Encore un effort. Avec une augmentation « modeste » des investissements, l'Onusida estime qu’elle « peut amener 35 pays à mettre fin à leur pandémie de sida d'ici à 2025 ». Dans un communiqué, l’agence onusienne de lutte contre le sida affirme qu’elle « doit augmenter son financement à seulement 1 % des 20 milliards de dollars de ressources consacrées au VIH pour soutenir efficacement les pays dans leur objectif d'éradication du sida d'ici à 2030 ». Explications.

    Supplique. Le 28 mars dernier, l’Onusida publie un communiqué qui demande instamment aux donateurs-rices d'augmenter « légèrement leur financement afin que 35 pays puissent mettre fin à leur pandémie de sida d'ici à 2025, soit cinq ans avant l'objectif de 2030 ». Aujourd’hui, le financement de l’Onusida s'élève à 160 millions de dollars, soit moins de 50 % des ressources disponibles en 2015. Pour un « impact maximal », l'Onusida estime avoir besoin de 210 millions de dollars par an, ce qui représente moins de 0,02 % du total des dépenses de santé dans les pays à revenus faibles ou intermédiaires.

    « L'Onusida est resté un partenaire inébranlable et fiable, défendant et tirant parti des forces du système des Nations Unies pour catalyser l'action, garantir les engagements, mobiliser les parties prenantes, produire des données faisant autorité, responsabiliser les communautés, s'attaquer aux vulnérabilités et aux obstacles », a rappelé Ruth Laibon-Masha, directrice générale du Conseil national de contrôle des maladies du Kenya. Et Ruth Laibon-Masha de poursuivre : « Saisissons ce moment historique, où nous sommes unis dans notre consensus sur la nécessité de rendre l'Onusida pleinement opérationnel, car nous ne doutons pas de la contribution de l'Onusida à la santé mondiale et de son rôle central dans l'élimination du sida en tant que menace pour la santé publique. Le Kenya réaffirme son engagement envers l'Onusida en honorant sa promesse de verser des fonds en 2024 et invite les autres pays donateurs et [sa promesse] de mise en œuvre à ne pas se laisser distancer en augmentant également leurs contributions ». L'institution prévoit que le financement intégral du programme commun permettrait à 35 pays d'atteindre les objectifs de suppression de la charge virale d'ici à 2025. Cette réalisation permettrait de sauver 1,8 million de vies, d'éviter 5,7 millions de nouvelles infections par le VIH d'ici à 2030 et d'établir une base solide pour que le monde mette fin au sida d'ici à 2030.

    Un plaidoyer pour l'institution onusienne

    « Si l'Onusida n'existait pas, nous demanderions tous sa création. Alors que nous célébrons les progrès accomplis, nous avons encore besoin d'une [agence] très forte et dotée de ressources suffisantes pour continuer à faire avancer les choses », a commenté l'ambassadeur John Nkengasong, coordinateur américain de la lutte mondiale contre le sida et haut responsable du Bureau pour la sécurité sanitaire mondiale et la diplomatie. « Une menace générationnelle exige un leadership soutenu — un leadership soutenu qui s'accompagne d'un engagement soutenu à financer l'Onusida. Les États-Unis se sont donc toujours engagés à renforcer l'Onusida et à continuer à faire de l’Onusida l'organisme qui nous fournit à tous l'étoile polaire ». Passons sur le registre lyrique de l’expert américain, mais notons que les États-Unis soutiennent cette initiative mondiale alors même qu’ils ont avec le Pepfar, la structure bilatérale de lutte contre le sida la mieux financée au monde.

    Du côté de Peter Sands, directeur exécutif du Fonds mondial, on a développé un autre argument : « Nous comptons sur l'Onusida pour faire entendre la voix des communautés les plus touchées par le VIH dans les politiques nationales de lutte contre le VIH et les processus décisionnels, ainsi que dans les efforts visant à améliorer l'accès aux services et à lutter contre la stigmatisation, la discrimination et les inégalités entre les sexes (…) Il est essentiel de veiller à ce que l'Onusida dispose de ressources suffisantes pour continuer à progresser dans la lutte contre le VIH ».

    Comme l'explique Mary Mahy, directrice de Data for Impact à l'Onusida, citée dans le communiqué officiel : « Les maladies traversent une période d'augmentation des nouvelles infections et, avec le temps, après la mise en œuvre d'interventions, les nouvelles infections commencent à diminuer et les pays atteignent un point de contrôle de la maladie, puis d'élimination et enfin d'éradication. Mais avec le VIH, nous ne sommes pas parvenus à contrôler la maladie au niveau mondial et certains pays en sont encore au stade de l'augmentation des infections. Il reste donc un travail considérable à accomplir dans le cadre de la lutte contre le VIH pour parvenir au contrôle, à l'élimination et à l'éradication de la maladie ». Des chiffres viennent illustrer ce constat. En 2022, chaque minute, une personne meurt du sida, 4 000 jeunes femmes et filles âgées de 15 à 24 ans sont infectées par le VIH chaque semaine, et sur les 39 millions de personnes vivant avec le VIH, plus de 9 millions n'ont pas accès à un traitement contre le VIH.

    "Des cycles de panique et de négligence"

    Dans le communiqué,  Winnie Byanyima, directrice exécutive de l'Onusida a rappelé l’enjeu : « Les pandémies ont tendance à suivre des cycles de panique et de négligence. Mais la sécurité sanitaire ne peut être assurée que lorsque nous brisons ces cycles et que nous concrétisons et maintenons les progrès que nous avons réalisés ensemble (…) Avec une augmentation modeste du financement, au cours des deux prochaines années, l'Onusida peut aider 35 pays à atteindre les objectifs de 95-95-95, et contribuer à maintenir les acquis. Il s'agira d'une réalisation mondiale exceptionnelle ». Le communiqué de l’agence onusienne met en évidence trois messages clés pour la période 2024-2025 :

    • Nous savons comment mettre fin au sida en tant que menace pour la santé publique. S'engager dans cette voie est un choix politique et financier ;
    • Un investissement modeste dans l'Onusida aura un impact maximal aux niveaux national et mondial ;
    • L'Onusida occupe une place unique en tant que chef de file de la riposte mondiale au VIH. L'investissement y est essentiel pour investir dans l'éradication du sida, la lutte contre les inégalités et le sauvetage de vies.

    D’un point de vue financier, l’équation actuelle n’est pas simple : crises financières, endettement auxquels de nombreux pays à revenus faibles et intermédiaires sont confrontés, dont la plupart sont également très touchés par le VIH. Environ 60 % des ressources destinées à la lutte contre le VIH dans les pays à revenus faibles et intermédiaires provenaient de sources nationales en 2022, contre 50 % en 2010. L’Onusida affirme jouer un « rôle essentiel » en veillant à ce que les « engagements politiques, programmatiques et financiers en faveur de la riposte au VIH soient maintenus ». En finançant pleinement l'Onusida et avec l’appui des partenaires de l’institution, on peut continuer à mener et à orienter stratégiquement la riposte au VIH, sur la base des données, des objectifs convenus et des principes énoncés dans la « Stratégie mondiale de lutte contre le sida 2021-2026 ».