L’Actu vue par Remaides : « La santé mondiale en recul : l’Onu en mode alerte »
- Actualité
- 11.08.2025
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Par Jean-François Laforgerie
La santé mondiale en recul :
l'Onu en mode alerte
Malgré des avancées notables depuis le début du siècle, une nouvelle évaluation de l’ONU indique que l’amélioration de la santé mondiale marque le pas. À cinq ans de l’échéance de l’Agenda 2030 (le plan d’action censé garantir un développement durable à l’échelle planétaire), la santé des populations mondiales progresse très modestement. L’objectif de développement durable (ODD) numéro 3, dédié à la santé et au bien-être, prévoit notamment d’ici 2030 de réduire la mortalité maternelle et infantile, de mettre fin aux grandes pandémies, de renforcer les systèmes de santé, d’élargir l’accès aux soins et de promouvoir la santé mentale. On en est loin comme l’expliquent les Nations-Unies.
En fin d’article, d’autres infos Monde.
Un tiers des cibles de l’ODD 3 (santé) en « bonne voie » ou en « progression modérée »
Entre 2000 et 2019, les indicateurs étaient encourageants : la mortalité maternelle et infantile avait chuté, le taux d’incidence du VIH baissé, et l’espérance de vie en bonne santé s’était allongée de cinq ans. Mais, la Covid-19 « a inversé certaines de ces avancées, réduisant l’espérance de vie mondiale de 1,8 an, et perturbant l’ensemble des efforts engagés », notent les Nations Unies.
Les maladies infectieuses et non transmissibles restent les deux grandes menaces. La tuberculose est redevenue en 2023 la première cause de décès liée à un agent infectieux, devant la Covid-19, tandis que les maladies non transmissibles – cancers, diabète, maladies cardiovasculaires – continuent de tuer plus de la moitié des personnes de moins de 70 ans dans le monde.
Mortalité maternelle et infantile : le progrès patine
Le taux de mortalité maternelle mondial a reculé de 228 à 197 décès pour 100 000 naissances entre 2015 et 2023. Cela reste cependant près de trois fois supérieur à la cible fixée par les Nations Unies. « Pour espérer l’atteindre d’ici 2030, il faudrait une réduction annuelle de 14,8 % – un rythme très éloigné des tendances actuelles », commente l’institution. L’Afrique subsaharienne et l’Asie du Sud concentrent 87 % des décès maternels, et peu de progrès y ont été enregistrés depuis 2015. Même constat du côté de la mortalité infantile : bien que le taux des décès des moins de cinq ans ait chuté à 37 pour 1 000 naissances vivantes, le rythme des progrès ralentit fortement. L’écart entre pays riches et pauvres demeure abyssal : un enfant né en Afrique subsaharienne a dix-huit fois plus de risques de mourir avant son cinquième anniversaire qu’un enfant né en Australie ou en Nouvelle-Zélande.
VIH, tuberculose, paludisme : des résultats fragiles
Les efforts contre le VIH/sida ont permis de diviser par deux les décès liés à la maladie depuis 2010. Mais 9,3 millions de personnes n’avaient toujours pas accès aux traitements vitaux en 2023, dont une majorité en Afrique. De plus, les financements chutent : la suspension de l’aide américaine en janvier 2025 menace directement l’accès aux traitements dans 55 pays, principalement africains, souligne l’Onu.
La tuberculose, elle, continue de frapper : 10,8 millions de cas en 2023, majoritairement dans 30 pays à forte charge. Si les décès sont repassés sous le seuil d’avant la pandémie (1,25 million), la baisse de l’incidence reste insuffisante pour atteindre l’objectif mondial d’ici 2030.
Le paludisme gagne du terrain : 263 millions de cas estimés en 2023 contre 226 millions en 2015. En cause : des lacunes persistantes dans la prévention. Plus de 40 % des femmes enceintes et des enfants de moins de cinq ans en Afrique subsaharienne n’ont pas accès aux moustiquaires imprégnées, pourtant essentielles.
Les maladies non transmissibles en tête des décès prématurés
En 2021, 18 millions de personnes de moins de 70 ans sont mortes de maladies non transmissibles. Si le risque de décès prématuré avait diminué dans les années 2000, les progrès ont stagné depuis 2020. À ce rythme, l’objectif onusien d’une réduction d’un tiers d’ici 2030 ne sera pas atteint.
La consommation de tabac, bien que globalement en baisse (–118 millions de fumeurs-ses depuis 2005), reste préoccupante. Côté alcool, la consommation moyenne a diminué, mais les effets sanitaires restent considérables, notamment en Afrique et en Europe.
Santé mentale : les taux de suicide reculent, mais des régions inquiètent
Le nombre de suicides dans le monde est passé de 12,5 à 9,2 pour 100 000 habitants-es entre 2000 et 2021. Certaines régions connaissent une hausse inquiétante, notamment l’Amérique du Nord (+ 33 %) et l’Amérique latine (+ 25 %). Les personnes vivant dans des pays à revenus faibles ou intermédiaires représentent 73 % des décès par suicide.
Contraception, natalité adolescente et vaccination : progrès inégaux
La proportion de femmes dont les besoins en contraception sont couverts par des méthodes modernes atteint désormais 77,2 % à l’échelle mondiale, avec des progrès notables en Afrique subsaharienne. La natalité chez les adolescentes a également reculé, passant de 13,9 à 12,4 millions de naissances par an entre 2015 et 2024. Mais les programmes de vaccination infantile restent affectés par la pandémie. La couverture pour le vaccin DTC3 (diphtérie-tétanos-coqueluche) stagne à 84 %, en deçà des niveaux d’avant 2020. La couverture vaccinale contre le papillomavirus humain (HPV), pourtant cruciale pour prévenir le cancer du col de l’utérus, reste très faible. Les épidémies de rougeole, elles, se multiplient dans de nombreux pays, faute d’une couverture suffisante.
Financement en baisse et main-d’œuvre insuffisante
L’aide publique au développement consacrée à la santé a chuté de 39 % entre 2022 et 2023, passant de 22,1 à 13,4 milliards de dollars. Les pays les moins avancés ont reçu 5,5 milliards, soit 40 % de l’enveloppe totale, en baisse de 20 %. Parallèlement, le monde compte désormais plus de 70 millions de professionnels-les de santé, mais la pénurie reste aiguë : 14,7 millions de postes manquent à l’appel, surtout en Afrique.
« Cinq ans pour redresser la trajectoire »
Alors que l’Agenda 2030 entre dans sa dernière phase, les Nations Unies appellent à des investissements audacieux, une action fondée sur l’équité et un renforcement massif des soins primaires. « Sans accélération forte des efforts, 30 millions d’enfants pourraient mourir avant leur cinquième anniversaire d’ici 2030. Et des millions d’autres – femmes, adolescents, personnes vivant avec le VIH ou exposées aux maladies chroniques – resteront en marge des soins essentiels. Le monde a cinq ans pour inverser la tendance », explique l’ONU.
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En bref, d'autres infos Monde
Le Sénat américain valide neuf milliards de dollars de coupes budgétaires réclamées par Donald Trump
Ouf… en partie. Le Sénat américain a adopté, mi-juillet, sous l'impulsion de la Maison Blanche et de la commission Doge (qui fut, un temps, dirigée par Elon Musk) un texte qui permettrait à l'administration Trump de ne pas avoir à dépenser quelque neuf milliards de dollars de fonds publics, principalement destinés à l'aide internationale. Huit milliards de dollars étaient destinés à l’agence d’aide au développement américaine USaid. Malgré une majorité républicaine de 53 sièges sur 100 au Sénat, le vote a été acquis à seulement 51 voix pour et 48 contre. Le programme mondial Pepfar de lutte contre le sida, créé sous George W. Bush, était initialement concerné par ces coupes, avec 400 millions de dollars annulés, mais des sénateurs-rices modérés-es ont obtenu de retirer cette portion du texte déjà adopté à la Chambre des représentants. La chambre basse devra donc à nouveau voter pour approuver la version modifiée, indique l’AFP. La Constitution américaine dispose que le Congrès possède, seul, le pouvoir d'allouer les fonds publics fédéraux. Le texte adopté à la Chambre des représentants vise ainsi à donner force de loi aux coupes identifiées par la commission Doge et demandées par la Maison Blanche, alors que ces fonds avaient déjà été approuvés précédemment par le Congrès.
AstraZeneca annonce investir 50 milliards de dollars aux États-Unis
Pression. Le géant pharmaceutique britannique AstraZeneca a annoncé qu’il prévoit d’investir 50 milliards de dollars pour la fabrication de médicaments et la recherche et développement d’ici 2030 aux États-Unis, où plane la menace de droits de douane de Donald Trump sur le secteur pharmaceutique. Cet investissement « renforce notre confiance dans l’innovation américaine sur les produits biopharmaceutiques et notre engagement envers les millions de patients qui ont besoin de nos médicaments en Amérique et dans le monde », a assuré le directeur général d’AstraZeneca Pascal Soriot dans un communiqué. Au nom du « rééquilibrage » des relations commerciales au profit des États-Unis, Donald Trump a imposé en avril une surtaxe plancher de 10 % sur les importations. Si les médicaments étaient initialement exemptés, le président américain a depuis dit considérer de les taxer, envisageant même une surtaxe de 200 %. « Depuis des décennies, les Américains dépendent de l’approvisionnement étranger en produits pharmaceutiques essentiels. Le président Trump et les nouvelles politiques tarifaires de notre pays visent à remédier à cette faiblesse structurelle », a commenté le secrétaire au Commerce américain, Howard Lutnick. AstraZeneca avait déjà annoncé, en avril, qu’il avait commencé à transférer vers les États-Unis une partie de sa production européenne, devant la menace de droits de douane de Donald Trump sur le secteur. D’autres grands groupes pharmaceutiques, qui étaient exemptés de droits de douane depuis 30 ans, ont amorcé ces derniers mois un mouvement d’investissement et de relocalisation de la production aux États-Unis, premier marché mondial du médicament, à coups de dizaines de milliards de dollars.
L’administration Trump va détruire pour dix millions de dollars de contraceptifs qui auraient dû être distribués par USaid
Gâchis. Avec la fin de l’USaid, le département d’État américain fait le choix de supprimer ces stocks plutôt que de les redistribuer. C’est ainsi, qu’a été décidée la destruction de contraceptifs, que l’USaid ne pourra pas distribuer. Cela concerne près de dix millions de dollars (environ 8,5 millions d’euros) de dispositifs de contraception initialement destinés à des pays défavorisés, pour un montant de près de 167 000 dollars. Le Guardian, cité par Libération, rapporte que cette destruction sera effective avant fin juillet. En juin, une parlementaire américaine avait tenté d’alerter dans une lettre le secrétaire d’État, Marco Rubio, sur la question. « C’est un gâchis de l’argent du contribuable et l’abdication du leadership mondial américain dans la prévention des grossesses non désirées, des avortements dangereux et des décès maternels », avait alors souligné Jeanne Shaheen dans un communiqué, cité par Libé.
Destruction de contraceptifs par Washington : des responsables de gauche demandent à Macron d’intervenir en urgence
Les Écologistes ont adressé samedi 26 juillet une lettre ouverte à Emmanuel Macron lui demandant d’intervenir en urgence pour empêcher la destruction prévue par les États-Unis de contraceptifs féminins, stockés en Belgique et qui pourraient être incinérés en France. Ces moyens de contraception (implants, stérilets), d’une valeur de 9,7 millions de dollars selon des informations de presse, sont destinés à « des pays à revenu faible ou intermédiaire dans le cadre des programmes de l’Agence américaine pour le développement international » (USaid), démantelée par l’administration Trump, écrivent-ils dans ce courrier, consulté par l’AFP, signé par la cheffe des Verts Marine Tondelier et plusieurs femmes parlementaires. Cette décision américaine est « un affront aux principes fondamentaux de solidarité, de santé publique et de droits sexuels et reproductifs que la France s’est engagée à défendre », ajoutent les signataires, exhortant Emmanuel Macron à « ne pas se rendre complice, même indirectement, de politiques rétrogrades ». « Baisser les aides à la contraception est une honte, détruire des produits déjà fabriqués et financés est encore plus hallucinant », s’est indignée Marine Tondelier auprès de l’AFP. Les Ecologistes demandent au chef de l’Etat « dans le cadre d’une initiative commune avec la Commission européenne » de demander la suspension de cette destruction. Ils-elles souhaitent aussi qu’il soutienne « explicitement » les organisations humanitaires qui se sont dit « prêtes à redistribuer ces contraceptifs ». La cheffe des députés-es La France insoumise (LFI) Mathilde Panot a aussi exhorté Emmanuel Macron et le Premier ministre François Bayrou à « agir pour empêcher cette destruction qui coûtera des vies », dans un message publié sur X. « Ces ressources sont vitales notamment pour les 218 millions de femmes qui n’ont pas accès aux soins contraceptifs », a-t-elle écrit. L’histoire a été révélée par The Guardian et, selon des informations de presse, ces contraceptifs sont entreposés en Belgique et doivent être incinérés en France. L’administration Trump a récemment reconnu avoir détruit des tonnes de nourriture destinées à des enfants souffrant de malnutrition car cette nourriture était périmée.
Les États-Unis rejettent des propositions de l’OMS pour lutter contre les pandémies
Bazar. L’administration Trump a annoncé vendredi 18 juillet que les États-Unis rejetaient les amendements adoptés en 2024 par les pays de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour lutter contre les pandémies. Elle affirme que ces dispositions « violent » la souveraineté américaine. En 2024, les pays membres de l’OMS ont adopté des amendements au règlement sanitaire international (RSI), un cadre juridiquement contraignant pour répondre aux urgences de santé publique. On avait pris la mesure des limites de ce dispositif pendant la crise de la Covid-19. Le président américain Donald Trump a décidé, dès son retour au pouvoir en janvier, de retirer les États-Unis de cette agence de l’ONU. Selon le département d’État, ces amendements sont toujours contraignants pour le pays. Le ministre de la Santé Robert Kennedy Jr et le secrétaire d’État Marco Rubio affirment dans un communiqué que « ces amendements risquent d’entraver indûment notre droit souverain à élaborer notre politique sanitaire ». « Nous placerons les Américains d’abord dans toutes nos actions, et nous ne tolérerons aucune politique internationale qui porte atteinte à la liberté d’expression, à la vie privée ou aux libertés individuelles des Américains », ajoute le communiqué. Les amendements introduisent la notion d’« urgence pandémique » et « plus de solidarité et d’équité », selon l’OMS. Ils avaient été adoptés après que l’organisation a échoué l’année dernière à conclure un accord mondial plus ambitieux dans la lutte contre les pandémies. En 2025, cet accord avait finalement été conclu, mais sans les États-Unis. « Nous regrettons la décision des États-Unis de rejeter les amendements », a déclaré le chef de l’OMS Tedros Adhanom Ghebreyesus dans un communiqué publié sur X. Il a souligné que les amendements « sont clairs au sujet de la souveraineté des États membres », ajoutant que l’OMS ne pouvait pas décider de confinements ou de mesures similaires. Washington, sous la présidence de Joe Biden, avait pris part aux négociations en 2024, mais n’était pas parvenu à trouver un consensus. Les États-Unis exigeaient, en effet, plus de protections concernant les droits de propriété intellectuelle sur les vaccins américains.
Fonds mondial : Le Premier ministre canadien pressé de donner
Des militants-es de la lutte contre le sida ont exhorté le gouvernement d’Ottawa, dirigé par le Premier ministre, Mark Carney, à renouveler rapidement le soutien du Canada à la lutte contre les maladies infectieuses à l’étranger, « avertissant que tout retard entravera davantage les efforts mondiaux de lutte contre les principales maladies », a expliqué La Presse canadienne (21 juillet). « Alors que certains pays réduisent actuellement leurs investissements dans la santé mondiale, le Canada peut et doit agir rapidement pour sauver des vies », a indiqué Justin McAuley, directeur de la branche canadienne de la campagne ONE. Son groupe fait partie des 24 organisations de la société civile canadienne qui ont demandé au gouvernement d’allouer 1,37 milliard de dollars canadiens sur trois ans au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. « Le Canada est l’un des principaux donateurs mondiaux du Fonds, qui représente la plus grande part des dépenses mondiales d’Ottawa en santé », explique La Presse canadienne. Justin McAuley espère qu’Ottawa annoncera bientôt son engagement, afin de créer une « dynamique » incitant d’autres pays à suivre son exemple. « Le Canada a un rôle et un héritage uniques à jouer dans le domaine de la santé mondiale, a-t-il expliqué. Notre élan sera précieux sur la scène internationale, si nous intervenons tôt et n’attendons pas la dernière minute. »