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    L'actu vue par REMAIDES : "Prep en Île-de-France : disparités de recours chez les HSH"

    • Actualité
    • 04.08.2024

    PREP

    © DR

    Par Fred Lebreton et Jean-François Laforgerie

    Prep en Île-de-France : disparités de recours chez les HSH

    Ces derniers jours, les principales informations sur l’actualité thérapeutique (soins et prévention) sur le VIH ont été présentées à l’occasion de la dernière conférence AIDS 2024 à Munich, en juillet. L’équipe de Remaides était présente et a réalisé des comptes rendus journaliers de l’événement. Deux infos importantes n’ont pas été traitées dans ce cadre. Il s’agit notamment de l’accès de la Prep en Île-de-France et des « disparités de recours chez les HSH » qui ont été identifiées. Le BEH (Bulletin épidémiologique hebdomadaire) N°14, du 23 juillet 2024, a publié un article très complet à ce sujet. Autre nouvelle : les personnes détenues sont plus exposées au VIH selon des données de l’Onusida. La rédaction de Remaides fait le point sur l’actu VIH.

    Prep en Île-de-France : disparités de recours chez les HSH

    Le BEH (Bulletin épidémiologique hebdomadaire) N°14, du 23 juillet 2024, a publié un article sur les « disparités géographiques et sociales du recours au dépistage et à la Prep chez les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) résidant en ÎIle-de-France ». Dans l’hexagone, la région Île-de-France est la région la plus touchée par l’épidémie du VIH, avec d’importantes disparités à l’intérieur de la région et dans les différents départements qui la composent. Cette région concentre également une proportion importante d’hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH) particulièrement touchés par le VIH. « Dans l’optique d’objectiver la possible fin des contaminations par le VIH en 2030 en Île-de-France », des chercheurs-ses ont cherché à « identifier les facteurs sociaux et territoriaux du recours au dépistage VIH et d’usage de la Prep des HSH selon le lieu de résidence en Île-de-France ».

    Pour cela, ils-elles ont utilisé des données issues de l’Enquête rapport au sexe (Eras) réalisée au premier semestre 2023. Il s’agit d’une enquête en ligne transversale et anonyme, auto-administrée et fondée sur le volontariat auprès des HSH. Au total : 18 525 répondants HSH actifs sexuellement dans les 12 derniers mois, non séropositifs au VIH, ont participé à l’enquête. Parmi eux, 27 % résidaient en Île-de-France dont : 51% à Paris, 29 % en petite couronne, et 20 % en grande couronne. Parmi les répondants d’Île-de-France, 42 % répondaient aux critères d’éligibilité à la Prep. Comparativement aux usagers de la Prep, les non-usagers étaient plus jeunes, avaient un moindre niveau d’études et résidaient davantage en grande couronne, éloignés de la communauté gay. Les résultats de l’étude mettent en lumière les « disparités socio-spatiales de l’appropriation des outils de prévention par les HSH franciliens ». Autrement dit : les résultats soulignent à la fois des disparités géographiques et sociales importantes dans les recours au dépistage du VIH et à la Prep sur le territoire francilien.

    « Les pratiques de dépistage annuel des Parisiens sont proches des recommandations, ce qui n’est pas le cas de celles des HSH résidant en grande couronne », expliquent les auteurs-rices. « Pour autant, la répétition des tests parmi les Parisiens multipartenaires, comme pour les autres Franciliens, reste en-dessous des recommandations d’un test tous les trois mois ». « L’usage de la Prep reste insuffisant en regard des comportements sexuels à risque, avec un même gradient territorial en défaveur des HSH de grande couronne, accompagné de disparités sociales (niveau d’études, éloignement avec la communauté gay) », poursuivent les auteurs-rices.

    Le niveau de connaissance de la Prep est très élevé parmi les HSH franciliens (supérieur à 90 %) avec une connaissance proche des 100 % pour les Parisiens. C’est chez ces derniers que le taux d’utilisation est le plus élevé (39 %) à un niveau comparable à celui observé à San Francisco (39 %), mais inférieur à celui des villes australiennes comptant plus de 10 % de résidents homosexuels (59 %), explique l’article du BEH. Les HSH de la grande couronne sont, proportionnellement, moins souvent éligibles à la Prep au regard de ses indications (nombre de partenaires sexuels moindre, pratique de la pénétration anale moindre, usage plus systématique du préservatif). Et lorsqu’ils sont éligibles, ils l’utilisent moins.

    Par ailleurs, les auteurs-rices rappellent que des « études antérieures ont montré que les HSH vivant en milieu rural ou en périphérie de zones urbaines rencontraient des obstacles supplémentaires ou plus importants que les HSH urbains en matière de prévention du VIH et que l’accessibilité géographique était un déterminant majeur du recours au dépistage et de l’utilisation de la Prep. Ces facteurs peuvent expliquer la situation des HSH résidant en grande couronne, dans des agglomérations moins densément peuplées, ne bénéficiant pas de la même offre de services de santé, qui est plus restreinte et moins accessible que pour les Parisiens ou les HSH de la petite couronne. Ces inégalités d’accès à la prévention sont visibles dans d’autres grandes villes dans le monde ». « Les initiatives menées à Paris, tant en termes de communication que d’accès, montrent leur efficacité dans un environnement favorable avec des recours élevés. En grande couronne, de nouvelles initiatives pourraient être développées en adaptant l’offre et la communication préventives aux contextes de vie des HSH dans les aires périurbaines de la région. Il est indispensable de travailler sur les inégalités socio-spatiales pour améliorer le recours au dépistage et à la prévention de l’ensemble de la communauté HSH et ainsi permettre de tendre vers les objectifs d’élimination du VIH », concluent les auteurs-rices.

    ➡️​ Chameau  Z, Champenois  K, Lert  F, Lefrançois  R, Mercier  A, Velter  A.  Disparités géographiques et sociales du recours au dépistage et à la prophylaxie pré-exposition (PrEP) chez les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) résidant en Île-de-France. Bull Épidémiol Hebd. 2024;(14):286-95

    Onusida : les personnes détenues plus exposées au VIH

    Les personnes en détention (et plus généralement toutes celles qui sont dans des lieux de privation de liberté) sont particulièrement exposées au VIH, rappelle l’Onusida dans son dernier rapport. En 2023, la prévalence du VIH chez les personnes détenues était deux fois supérieure à celle chez les personnes adultes (15-49 ans) en population générale. Un des facteurs explicatifs réside dans les difficultés d’accès à la prévention et aux traitements, dans les prisons et autres établissements fermés, ce qui constitue un problème de justice sociale et d’égalité en matière d’accès universel à la santé. L’accès aux traitements est l’objet de graves manquements en détention. Sur les 37 pays qui ont rapporté des données sur le taux de couverture en traitements ARV dans leurs prisons, seuls 18 pays rapportent un taux de couverture en ARV de 95 % ; cinq pays font état d’un taux de couverture inférieur à 50 % des besoins. Au niveau mondial, on constate une défaillance importante des programmes VIH à destination des femmes détenues.

    L’Onusida a compilé quelques données. En 2023, la prévalence du VIH parmi les personnes détenues est de 1,3 % (données sur 70 pays). Elle est de 0,6 % en Amérique latine (données sur onze pays) et de 2,7 % dans les Caraïbes (données sur six pays). Sont aussi renseignées les prévalences concernant des co-infections. La prévalence de la co-infection Tuberculose et VIH est de 0,1 %. Elle va, selon le pays, de 0 % à 19 % (données concernant 19 pays). Concernant la co-infection VIH/VHC, elle s’échelonne, selon le pays, de 0 % à 53 % !

    Ces dernières années, une augmentation (lente et modeste) des services et programmes de prévention du VIH et des IST dans les prisons a été constatée. Entre 2027 et 2024, 55 pays ont mis en place des programmes pour proposer des préservatifs et des lubrifiants. Neuf pays ont mis en place des programmes d’échanges de seringues (PES) et 29 permettent la délivrance de traitements contre les surdoses d’opioïdes. Par ailleurs, pas moins de 156 pays possèdent des lois criminalisant l’exposition, la non-divulgation du statut sérologique, voire la transmission du VIH. Dans le nombre, 152 pays criminalisent la possession de drogues, y compris en petites quantités ; 170 sanctionnent le travail du sexe ; 63 répriment les « activités homosexuelles » et 16 les personnes trans. D’ailleurs, un pourcentage significatif de personnes sont en détention suite à des condamnations pour usage de drogue, exercice du travail du sexe, « activité homosexuelle » ou du fait de leur identité de genre.

    ➡️​ That never happens here: sexual and gender-based violence against men, boys, and/including LGBTIQ+ persons in humanitarian settings. Geneva : International Committee of the Red Cross ; 2022