Rapport Discriminations 2018
- Publication
VIH, hépatites : la face cachée des discriminations 2018
Les personnes nées à l’étranger et résidant en France représentent chaque année près de la moitié des découvertes de séropositivité au VIH, et sont particulièrement touchées par les hépatites virales. Il est aujourd’hui démontré que c’est la situation de précarité administrative et sociale des personnes étrangères qui nuit à leur santé et accentue leurs risques de contamination. Enrayer la dynamique des épidémies ne peut donc se faire sans une véritable politique d’accueil, qui s’attache à réduire la précarité des personnes étrangères dès leur arrivée sur le territoire.
Plus de droits, c’est moins de VIH et d’hépatites.
Améliorer les conditions de vie des personnes étrangères séronégatives réduit leur risque d’exposition à une contamination. Favoriser l’accès et le maintien dans le soin des personnes étrangères vivant avec le VIH leur permet d’être en charge virale indétectable et de ne plus transmettre le virus. En dépit du consensus sur ces enjeux de protection de la santé individuelle et publique, les réformes relatives à l’asile et à l’immigration, auxquelles vient de s’ajouter la loi de septembre 2018, se succèdent et se ressemblent, dans une surenchère répressive et sécuritaire. Dans un climat de défiance et de soupçon généralisé, les démarches administratives des personnes étrangères deviennent de véritables parcours du combattants-es.
Dans ce contexte, AIDES fait le choix de consacrer l’intégralité de l’édition 2018 de son rapport annuel VIH/hépatites, la face cachée des discriminations aux droits et à la santé des personnes étrangères. Ce rapport est réalisé en collaboration avec l'ARDHIS, qui accompagne les demandeurs-euses d’asile LGBTI+ depuis 20 ans. L’analyse de données de terrain permet de mettre en évidence les restrictions d’accès aux droits que subissent les personnes étrangères, qu’elles vivent avec le VIH et/ou une hépatite virale, ou qu’elles présentent un cumul de vulnérabilités face aux risques de contamination. Trois dispositifs essentiels à l’accueil et à la protection de la santé de ces populations sont particulièrement en cause :
- la couverture maladie des personnes étrangères en séjour irrégulier ou précaire qui se voit progressivement restreinte par le droit et dans les faits, entravant directement l’accès aux soins et à la prévention des personnes concernées ;
- le droit au séjour pour raisons médicales pour les étrangers-ères souffrant d’une affection grave sans accès aux soins dans leur pays d’origine qui subit les assauts répétés des réformes de la politique d’immigration ;
- le droit d’asile des personnes LGBTI+ amplement entravé du fait d’une insuffisante prise en compte de leurs problématiques spécifiques dans la procédure d’asile, encore accrue par les nouvelles restrictions apportées par la loi « asile et immigration » de 2018.
A travers cette publication, AIDES et l’ARDHIS décrivent leurs constats de terrain, analysent les mécanismes à l’œuvre et en dénoncent les impacts individuels et collectifs. Les associations émettent à chaque fois des recommandations afin de faire évoluer la situation. Ce rapport entend ainsi contribuer à la prise de conscience, à l’indignation et à la mobilisation face aux politiques répressives en matière d’asile et d’immigration. Il s’inscrit dans la lutte pour le respect des droits fondamentaux des personnes étrangères, au bénéficie de la santé et d’une société réellement inclusive.
Illustrations : Studioburo
Accès aux chapitres
Chapitre 1. Restrictions d'accès à la couverture maladie pour les personnes étrangères en séjour irrégulier ou précaire.
L’accès à une couverture santé complète, indépendamment de la nationalité ou du statut administratif, est un enjeu primordial pour mettre fin aux épidémies de VIH et d’hépatites B et C. Il s’agit de donner toutes les chances aux personnes séronégatives de le rester, en ayant accès à des dispositifs de prévention et de dépistage, et en bénéficiant de conditions de vie minorant l’exposition à une contamination. Il s’agit également de permettre aux personnes vivant avec le VIH (PVVIH) d’avoir accès aux traitements et de pouvoir se maintenir dans le soin, d’être et de rester en charge virale indétectable et ainsi de ne plus transmettre le virus. Pourtant, malgré le consensus sur ces enjeux de santé individuelle et de santé publique, les personnes étrangères, sans droit au séjour ou en situation de précarité administrative – demandeur-se d’asile, titulaire de titre de séjour temporaire, en cours de régularisation ou de renouvellement de titre de séjour – souffrent de restrictions croissantes d’accès à une couverture maladie. Leur entrée et leur maintien effectifs dans le système de santé se voient ainsi compromis.
Chapitre 2 . Remise en cause du droit au séjour pour raison médicale à toutes les phases de la procédure.
Le droit au séjour pour raison médicale permet aux étrangers-es souffrant d’une affection grave, sans accès aux soins dans leur pays d’origine, d’obtenir un titre de séjour en France pour se soigner. Vingt ans après sa mise en place en 1998, cet acquis de la lutte contre le VIH/sida subit les assauts des réformes restrictives des politiques d’immigration, réformes qui n’en finissent pas de se succéder. Fragilisé à toutes les étapes d’une procédure complexe, ce droit au séjour, déterminant pour la protection des malades étrangers-es qui vivent avec le VIH et/ou une hépatite virale, est aujourd’hui en danger. Alors que les conséquences de la réforme de 2016 conduisent à une multiplication des refus de séjour à l’encontre des personnes vivant avec le VIH (PVVIH), la loi asile et immigration de 2018 fait peser de nouvelles menaces sur ce droit fondamental pour la santé des étrangers-es.
Chapitre 3: Demande d’asile LGBTI+ : un droit entravé.
En 2018, dans 71 états, des lois pénalisent les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, trans ou intersexe (LGBTI+) par des peines de prison, de la torture ou encore des travaux forcés. Sept d’entre eux condamnent toujours les homosexuels-le à la peine de mort. Pour de nombreuses personnes LGBTI+ dans le monde, l’exil est le seul moyen de continuer à vivre, et de vivre en liberté. Les évolutions des politiques en matière de droits LGBTI+ d’une part, et du droit d’asile d’autre part, permettent à celles et ceux qui le décident et qui arrivent à rejoindre la France d’y solliciter une protection internationale au titre des (craintes de) persécutions dans leur pays d’origine. Néanmoins, très souvent, ces politiques ne prennent pas pleinement en compte les spécificités de ce groupe.