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    L’Actu vue par Remaides : Actions Traitements : « Il était important d’avoir un événement qui revisibilise la lutte contre le sida et surtout les personnes vivant avec le VIH »

    • Actualité
    • 18.08.2025

     

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    Jean-Marc Bithoun, membre du Conseil d'administration d'Actions Traitements,
    dont il est également le président d'honneur.
    Crédit photo : DR.

    Par Jean-François Laforgerie

    Actions Traitements : "Il était important d'avoir un événement qui revisibilise la lutte contre le sida
    et surtout les personnes vivant avec le VIH"

    Les États généraux des personnes vivant avec le VIH (EGPVVIH), les premiers depuis 20 ans, se sont déroulés du 25 au 27 mai 2024 à Paris. Après plus de 40 ans d’épidémie du VIH/sida, les EGPVVIH entendaient être un « espace de dialogue créé par et pour les personnes concernées ». Un an plus tard, la rédaction de Remaides donne la parole à celles et ceux qui ont participé à cet évènement. Rencontre avec Julia Charbonnier, directrice de l’association Actions Traitements et Jean-Marc Bithoun, membre du conseil d'administration de l’association, dont il est également président d’honneur.

    Remaides : Pouvez-vous vous présenter ?
    Jean-Marc Bithoun :
    J’ai 69 ans. Je suis séropositif depuis 1984, officiellement. Je suis engagé dans l'association depuis sa création, en 1991. À vrai dire, c'est la perte d'un ami qui m'a projeté vers les associations. Je ne savais pas ce qu’était une association de lutte contre le sida à l'époque. Aujourd’hui, je suis écoutant sur la ligne d'écoute d’Actions Traitements [voir en fin d’article, ndlr], je suis membre du conseil d'administration de l’association, dont je suis également président d’honneur. Je participe à différentes activités ainsi qu’à des ateliers thématiques, des opérations de sensibilisation dans des écoles concernant les discriminations. Cela fait beaucoup d’activités, mais il y a beaucoup à faire.

    Julia Charbonnier : Je suis la directrice de l'association Actions Traitements. Nous sommes une association de patients, de personnes vivant avec le VIH, engagée depuis plus de trente ans dans l'accès à l'information thérapeutique, la défense des droits des personnes vivant avec le VIH et l'accompagnement de ces personnes. Nous sommes aussi de plus en plus tournés vers la prévention, notamment la prévention biomédicale [voir encart ci-dessous, ndlr] pour les personnes exposées aux virus. Nous nous intéressons également aux autres IST comme, par exemple, les papillomavirus humains, les hépatites virales, etc. Nos actions s'articulent autour de l'empowerment [on parle aussi d’enpouvoirement, ndlr] des personnes concernées, de la lutte contre les discriminations, et du partage des savoirs issus de l'expérience des personnes concernées.

    Remaides : Il y a un an, ont eu lieu les États généraux des personnes vivant avec le VIH, qui ont donné lieu à une série de recommandations. Cela faisait 20 ans qu'un tel événement n'avait pas eu lieu. Qu’y avez-vous fait et qu’en retenez-vous ?
    Jean-Marc Bithoun :
    À titre personnel, je n'ai pas participé à l'élaboration de l'événement. J’y suis venu comme participant. C’était une première pour moi, car je n’avais pas participé à l’édition 2004. Cela a vraiment été un moment très particulier. D'abord parce que j'y ai retrouvé beaucoup de gens que je connaissais, que j'avais déjà rencontrés dans des associations, ou des personnes qui sont comme moi séropositives, avec lesquelles j'avais déjà eu pas mal d'échanges. Cela a été un moment très fort sur le plan humain. Par ailleurs, nous avons pu aborder ensemble et en petits groupes, les problématiques que nous rencontrons dans notre quotidien ; à savoir tout ce qui est du domaine du parcours de soins et toutes les embuches qu’on peut rencontrer. À titre d’exemples : les difficultés à trouver un médecin traitant, le manque de coordination qu'il peut y avoir entre les différents médecins qui nous prennent en charge, qu’il s’agisse des spécialistes, des infectiologues, des généralistes. La question de la coordination entre les différents médecins a été largement abordée dans les groupes. Nous avons aussi beaucoup parlé des difficultés administratives que l’on peut rencontrer : cela va des titres de séjour à l’accès aux assurances, qui reste un gros problème, même si cela a évolué. Reste qu’emprunter n’est toujours pas simple. De la même façon, l’accès aux titres de séjour pour soins se complique. Nous avons beaucoup abordé cette question, d’autant qu’on sait que plus de 50 % des titres de séjour pour soins ne sont plus accordés. Et je ne sais pas quand et si la situation va s’arranger. Les questions de retraite ont aussi été abordées, parce que nous vieillissons avec le VIH, ce qui est une « chance ». Nous ne pensions d’ailleurs pas que nous allions vieillir. L'arrivée à la retraite comporte aussi son lot de problématiques, dont celle de la baisse des ressources ou celle du logement. Il faut parfois se reloger parce qu’on vit dans des appartements à des étages élevés qu’on ne peut plus monter. Nous avons également échangé sur la peur du vieillissement. Qu’allons-nous devenir ? Comment allons-nous être traité ? Serons-nous acceptés dans les EHPADs ? Peut-on imaginer ensemble d’autres alternatives ? Voici quelques-uns des sujets importants qui nous ont réunis.
    Enfin, j’ajouterai que cet événement a vraiment mobilisé de nombreuses associations au niveau national, dans l’Hexagone comme dans les Drom-Tom. C'était très important pour moi que toutes ces associations aient été invitées, dont Actions Traitements, à préparer cet événement et à y contribuer.

    Julia Charbonnier : Je n’ai pas assisté à ces États généraux, mais j'ai pu échanger avec de nombreuses personnes qui ont participé à ce week-end. Ce que j'ai retenu : c'est l'intensité des échanges ; le fait que cela ait permis un vrai espace de reconnaissance entre pairs, comme le souligne Jean-Marc. J'ai pu assister à la journée de restitution [organisée au ministère des Affaires sociales et de la Santé, ndlr]. Là, c'est la richesse des témoignages qui m'ont vraiment marquée, et la force de cette intelligence collective ; vraiment le fait que toutes les personnes aient travaillé ensemble pour construire en commun, et que ce travail n’ait pas seulement pointé des manques, mais qu’il ait proposé des recommandations, et ainsi créé une nouvelle mobilisation et un dynamisme collectif.
     

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    Julia Charbonnier, directrice de l'association Actions Traitements.
    Crédit photo : DR

     

    Remaides : En quoi, était-ce important de lancer de nouveaux États généraux en 2024 ? Y avait-il urgence ?
    Jean-Marc Bithoun :
    Je pense que cela faisait trop longtemps qu'il n'y avait pas eu d'États généraux. Il était temps de remettre les choses à niveau ; encore plus dans cette période où on voit bien que la lutte contre le sida souffre, par rapport aux institutions qui ont tendance à marginaliser notre action, alors que les enjeux sont toujours aussi importants, si ce n'est plus important qu’avant. Je mentionnais tout à l’heure le parcours de soins, les titres de séjour. Sur ce sujet, on voit bien que pour les migrants, cela devient de plus en plus compliqué. Les droits sociaux, l’accès à un logement, etc., les enjeux sont importants et ce n’est pas le moment de réduire la voilure. Cette initiative permet de remettre à l'ordre du jour toutes ces questions et peut-être en les faisant remonter auprès de nos politiques de les réinscrire à l'agenda.

    Julia Charbonnier : Jean-Marc souligne des enjeux importants. L’ambition est de mettre fin à l'épidémie, d’atteindre les objectifs du 3 x 95 [95 % des personnes vivant avec le VIH sont diagnostiquées, 95 % des personnes diagnostiquées sont sous traitement, 95 % des personnes sous traitement ont une charge virale indétectable, ndlr]. Nous savons, concernant la France, que nous n’en sommes pas loin. Mais ce qui nous inquiète ― c'était d’ailleurs la thématique de notre colloque annuel de 2024 [voir encart ci-dessous] ―, c’est cette invisibilisation des personnes vivant avec le VIH et, plus largement, de la lutte contre le VIH. On peut prendre l’exemple des Corevih [comité de coordination régionale de lutte contre le VIH et les infections sexuellement transmissibles] qui sont devenus des Coress [comité de coordination régionale de la santé sexuelle]. On sait que les associations de lutte contre le VIH y seront moins représentées. Dans ce contexte, il était donc très important d'avoir un événement pour « revisibiliser » la lutte contre le VIH et surtout les personnes vivant avec le VIH. Il y a, malheureusement, encore beaucoup de discrimination. Et il y a une coordination à améliorer pour atteindre les objectifs dont Jean-Marc parlait.

    Remaides : Nous vous avons proposé de revenir sur une thématique largement abordée lors des États généraux et que vous connaissez bien, qui est de bien vivre avec ces traitements. Sur ce sujet, qu'est-ce qui vous a marqué concernant les échanges et les recommandations qui ont émergé de cet événement ?
    Jean-Marc Bithoun :
    J’ai eu une prise de conscience : je n'étais pas le seul à vivre ce que je vivais. Et ce qui m’a frappé, c’est la question des comorbidités, de nombreuses personnes étaient concernées par cela. D’ailleurs, il y avait beaucoup de questions autour de la prise en charge [aujourd’hui, on parle plus souvent de prise en soins, ndlr] de tout ce qui concerne les maladies cardio-vasculaires, du syndrome métabolique, de la prise de poids, des difficultés qu'on peut avoir à faire certaines activités, à bouger, etc. Il a beaucoup été question de la douleur, c’est un sujet qui reste très prégnant chez de nombreuses personnes. Je m’en rends bien compte à travers la ligne d'écoute d’Actions Traitements : certaines personnes vivent vraiment des vies impossibles avec des douleurs permanentes. J’ai aussi vu lors de l’événement, qu’aujourd’hui encore, pas mal de gens vivaient très mal leur séropositivité, alors que les traitements sont plus efficaces. En fait, rien n’est simple. C’est ce que j’ai ressenti lors des échanges. Quant aux recommandations, elles sont bonnes car elles permettent de faire remonter ce qui se passe vraiment à la base, si je peux le formuler ainsi.

    Julia Charbonnier : Je retiens une des recommandations qui concerne la prise en charge globale des personnes vivant le VIH, qui ne se limite pas au médical. Ce qu’il est important de prendre en compte, c’est le parcours de vie de la personne et de réaliser que chaque personne a sa propre histoire et ses conditions de vie qu'il faut intégrer.

    Remaides : Lors des États généraux, des recommandations ont été faites à destination des professionnels-les de santé. Certaines insistaient sur la nécessité d'un parcours de soins qui soit complet et d'une prise en charge globale des personnes vivant avec le VIH. Sous-entendu que ce n'est pas toujours le cas aujourd’hui, alors que cela fait partie des recommandations officielles des experts-es du VIH. Actions Traitements plaide depuis longtemps pour cela, et met en place des actions pour atteindre cet objectif. De votre point de vue, que peut-on faire collectivement de plus, de mieux ?
    Jean-Marc Bithoun :
    Je pense que nous devrions être plus proches des médecins surtout en infectiologie. En tout cas à l'hôpital, on devrait avoir des actions nous permettant de mieux approcher les médecins qui prennent en charge, et ce d’autant que l’on voit de moins en moins le médecin infectiologue à l'hôpital. Certaines personnes le voient tous les six mois, et de plus en plus, c’est même une fois par an. Cela crée une forme d’éloignement du soin et les médecins généralistes, faute de temps, de formation sur le VIH, d’une patientèle trop élevée, ne prennent pas le relais ; sauf certains généralistes, rares, qui sont des spécialistes du VIH.
    À une époque, par exemple, dans un service que je connaissais, des dépistages des condylomes étaient réalisés juste après avoir vu l'infectiologue, le médecin qui s'occupait de cela a pris sa retraite. Il n'y a pas eu de relais. Il faut désormais qu'on fasse cet examen en ville où c'est à nous de nous débrouiller tout seul. Or, en ville, ce n’est pas toujours simple… Une question comme cela pouvait être traitée dans les Corevih, où nous avions cette possibilité d’être beaucoup plus proches des infectiologues puisqu’on les côtoyait au sein de cette instance. On va devoir s’accrocher encore plus puisque la partie VIH a été, à mon sens, plus ou moins marginalisée avec le nouveau périmètre des Coress. Les associations de lutte contre le sida vont devoir redoubler d’efforts pour qu’il y ait toujours des actions spécifiques sur le VIH et une meilleure prise en charge globale des personnes vivant avec le VIH, notamment sur les comorbidités. Enfin, j’ajoute que cela s’inscrit dans un contexte où l’hôpital est fragilisé du fait d’un manque de moyens financiers et humains. Vous voyez bien que dans des hôpitaux, si on veut une consultation avec un cardiologue, il faut parfois attendre des mois et des mois. C’est bien beau d’avoir des idées, mais comment les faire aboutir, surtout lorsque les moyens manquent ? Une des pistes pour moi serait d’avoir des lieux en ville qui seraient plus adaptés à notre problématique globale. Des lieux où on pourrait faire tout ce suivi, parce que l'hôpital, on voit bien qu’il nous délaisse.

    Julia Charbonnier : Jean-Marc parle beaucoup de coordination médicale. Je parlais tout à l'heure d’une prise en charge globale, pas juste médicale, mais aussi psychologique, sociale et juridique. Une approche pluridisciplinaire réelle, ancrée dans le quotidien des personnes vivant avec le VIH. Aujourd'hui, on sait que ce n'est pas le cas. Cet accompagnement global, cette approche globale existent très peu. Beaucoup d'associations essayent de combler cela. À Actions Traitements, nous proposons différentes permanences : une permanence d'éducation thérapeutique du patient, une permanence psy, une permanence sociale et juridique. Mais malheureusement, il nous manque des moyens. Jean-Marc parlait des hôpitaux qui n'ont pas ou plus les moyens. Les associations aussi ont de moins en moins de moyens.
    Et c'est compliqué du coup, parce que nous nous efforçons de boucher les trous de la raquette, mais si on nous enlève des moyens, cela va être de plus en plus compliqué. Notre association fait partie d’un groupe de travail, animé par Sidaction, autour de la thématique du bien vieillir des personnes vivant avec le VIH. Nous nous sommes rapprochés des dispositifs d'appui à la coordination (DAC) pour mieux les comprendre et voir si on pouvait travailler avec eux pour qu'ils puissent coordonner l'accompagnement global des personnes vivant avec le VIH. Cela reste, pour le moment, très dispositif dépendant. La problématique actuelle, c'est le manque de moyens qui affecte de nombreuses structures.

    Remaides : Votre association mène de nombreux projets et initiatives, des ateliers, des permanences. Vous faites beaucoup d'information ; vous faites beaucoup de partage de connaissances scientifiques. De vos connaissances de terrain, quelles sont les personnes vivant avec le VH qui disent aujourd'hui qu'elles vont bien ou mieux avec leur traitement et qu'est-ce qui y contribue ?
    Jean-Marc Bithoun :
    Selon moi, ce sont les jeunes, les personnes nouvellement infectées qui ne vivent pas les mêmes choses que celles que nous avons connues dans les années 80. Il y a aujourd’hui des traitements qui sont déjà moins toxiques, une simplification du schéma thérapeutique, peu de difficultés avec les résistances. La donne change aussi avec les traitements à longue durée d'action.
    Aujourd’hui, la différence par rapport à notre époque, est qu’on peut prendre un traitement plus simple, efficace, qui permet d’obtenir rapidement une charge virale indétectable. On peut vivre plus facilement le I = I, et cela est très important dans le parcours de vie d’une personne vivant avec le VIH par rapport à la vie personnelle, la vie sexuelle. C’est quand même important de savoir qu’on ne peut pas infecter et qu’on a plus de facilités pour faire des projets, se marier, avoir des enfants, voyager.
    Pour les plus anciens comme nous, le parcours, aujourd'hui, est plus compliqué. Dans le sens, comme je le disais plus tôt qu’il y a des comorbidités dont certaines sont liées au VIH, d’autres au traitement, et d’autres, enfin, à l'âge. Et tout cela se cumule avec les aspects sociaux dont j'ai parlé : les questions de logement, de retraite, de revenus. Je pense que les jeunes sont davantage « privilégiés », mais ce n'est pas une jalousie, ni un reproche. De mon point de vue, certaines choses sont plus simples, plus faciles aujourd’hui, mais je n’ignore pas l’impact psychologique de l’annonce de la séropositivité et le poids de la sérophobie [le rejet sur les sites de rencontres, par exemple, ndlr], qui concernent toutes les personnes vivant avec le VIH, qu’elles soient nouvellement diagnostiquées ou pas.

    Julia Charbonnier : Jean-Marc vient de parler des jeunes nouvellement infectés. J’ajoute qu’il existe des inégalités pour bien des personnes récemment infectées. C’est le cas des personnes migrantes. Par exemple, les femmes migrantes ont plus de difficultés à accéder aux innovations thérapeutiques [les traitements par injection, par exemple, ndlr]. On sait que les parcours administratifs, les obstacles à l'obtention d'un titre de séjour pour soins, la menace de la suppression de l'AME, rendent l'accès au traitement plus fragile. Et malheureusement, aujourd'hui, il y a de nombreuses personnes vivant avec le VIH qui vont cumuler ces vulnérabilités et précarités. L'accès au logement, l'accès aux papiers, tout cela reste des déterminants clés. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle à l’association, nous allons justement accompagner ces personnes dans ces démarches administratives pour lever les freins. Des freins qui portent à la fois sur l'observance et l'accès aux innovations thérapeutiques. À Actions Traitements, nous rencontrons beaucoup de personnes migrantes ; surtout des femmes qui ont des difficultés d'observance du fait de leur situation de vie, de la stigmatisation et de la discrimination auxquelles elles doivent faire face. Par exemple, les femmes qui vivent dans des centres d'hébergement et qui doivent cacher leurs traitements et le fait qu'elles le prennent tous les jours, ce qui peut conduire à sauter certaines prises. Nous avons mis en place des actions spécifiques qui vont des groupes de parole en non-mixité aux permanences psychologiques individuelles, des stages d'autodéfense pour renforcer la sécurité et l'estime de soi à des ateliers collectifs sur le bien-être, comme la sophrologie ; un moyen de recréer du lien, de rompre l'isolement, de renforcer les capacités des personnes, d’améliorer l'adhésion au traitement. Nous travaillons aussi sur le renforcement de la littératie en santé (voir encart ci-dessous), parce qu'on sait très bien qu'il y a malheureusement beaucoup de personnes qui n'ont pas accès aux informations dont elles ont pourtant besoin pour mieux comprendre le VIH, les traitements, les effets indésirables ; pour savoir comment poser des questions à son médecin. Tout cela est beaucoup travaillé en ateliers collectifs. Cela facilite la demande d’un changement de traitement, si besoin, et contribue à connaître les avancées thérapeutiques. Pour nous, c'est vraiment un élément clé, renforcer ce pouvoir d'agir, et donc l'empowerment des personnes, de toutes les personnes vivant avec le VIH, pour améliorer l'accès aux innovations thérapeutiques. C’est une des clefs pour améliorer la qualité de vie des personnes.

    Remaides : Vous l'avez évoqué, un des enjeux actuels est l'avancée en âge. C’est à la fois une chance et un défi. De nombreuses structures travaillent sur cette question. Depuis longtemps, le monde de la lutte contre le sida s’efforce de trouver des solutions. De votre point de vue, quelles sont les priorités, à la fois en termes de traitements, de prise en compte des comorbidités, de coordination, etc. ?
    Jean-Marc Bithoun :
    C’est surtout le médecin généraliste qui nous suit pour les bobos de chaque jour mais qui surveille aussi ce genre de problématiques. Mais ce n’est pas suffisant. Je crois que c'est à nous en tant que patients de jouer un rôle pour suggérer à nos médecins certains examens, d’approfondir certains aspects de la prise en charge, par exemple dans le champ cognitif. Faire un bilan cognitif, ce n'est pas quelque chose qu'on va nous proposer d'emblée. Moi, j'en ai parlé avec mon médecin ; cela lui a donné l'idée ; elle va me le proposer. Comme le disait Julia tout à l'heure, c'est justement en informant et en formant les personnes comme nous, qu’elles vont avoir un rôle plus actif, qu’elles vont pouvoir solliciter les personnes qui les prennent en charge. Une des solutions est bien de renforcer l'empowerment des personnes autour de leurs enjeux de santé de façon qu'elles soient beaucoup plus proactives, par exemple, dans les discussions avec les soignants. Il existe des moyens et des outils ; certains sont peu utilisés. Un moyen de préparer sa consultation est de dresser une petite liste des questions qu'on veut poser au médecin. Parfois, le médecin est pressé. Il remplit la base de données et si l’on n’est pas préparé, on oublie. Tout le monde n’a pas ce besoin. Certaines personnes se fient au médecin. Je le vois bien sur la ligne d’écoute. Parfois, je pose la question sur ce qu’il s’est passé en consultation.
    - « Ah, ben, mon médecin, il m'a dit que ça allait bien. ».
    - « Vous connaissez votre nombre de T4 ? »
    - « Je ne sais pas. Le médecin a dit que ça allait bien. »
    Il y a des personnes qui n’ont pas besoin d’informations précises et d'autres qui ont besoin d’être beaucoup plus proactives dans les échanges. Être acteur de sa santé, c’est ce que nous avons toujours défendu depuis la création d’Actions Traitements. Se fier au seul milieu médical n’est pas suffisant. Il faut aller au-delà.

    Julia Charbonnier : C’est un axe de travail important pour l'association. Nous avons initié différentes actions depuis plusieurs années maintenant, spécifiques pour les personnes vivant avec le VIH de plus de 50 ans. Nous proposons des permanences individuelles, des permanences ou ateliers sur le thérapeutique, le social, les aspects juridiques, psy, la diététique aussi, etc. pour répondre aux différentes problématiques complexes liées à l'avancée en âge. Nous travaillons aussi sur la précarité. Actions Traitements a participé, l'année dernière, à l'étude Moi Patient sur les personnes vivant avec le VIH de plus de 50 ans. Elle montrait que plus de 30 % des personnes vivant avec le VIH de plus de 50 ans étaient en situation de précarité ; ce qui est un chiffre élevé. Cette précarisation augmente. Il faut donc aussi accompagner les personnes concernées sur cet axe. Nous proposons d’ailleurs des permanences individuelles pour identifier les fragilités et même orienter les personnes vers des gériatres, si besoin. Jean-Marc évoquait des thématiques importantes comme la gestion de la douleur, les troubles neurocognitifs, etc. Nous proposons des ateliers autour de la gestion de la douleur, des ateliers pratiques sur la mémoire et les troubles neurocognitifs, avec une neuropsy. On propose des ateliers d'activité physique adaptée par le renforcement musculaire, toutes les semaines, avec une structure partenaire. Nous allons proposer à l’association différents ateliers thématiques collectifs, pour certains en intergénérationnel, parce qu’il nous semble important de créer ce lien entre différentes générations de personnes vivant avec le VIH. Nous proposons aussi des ateliers autour de la vie affective et sexuelle animés par le docteur Patrick Papazian [contributeur de Remaides, avec la rubrique Sexo, ndlr]. Toujours en intergénérationnel, on propose des cafés Sexo mensuels, animés par notre psychologue et sexologue et toujours par un patient intervenant. C'est vraiment important pour nous, cet accompagnement par les pairs et ce partage d'expériences. À ces ateliers s’ajoutent des groupes d’autosupport mensuels, animés par nos patients intervenants, dont Jean-Marc, pour permettre aux personnes de rompre l'isolement, de partager leur expérience et de recréer du lien social. Nous n’en avons pas encore parlé, mais rompre l'isolement est vraiment une problématique forte qu'on retrouve chez la majorité des personnes vivant avec le VIH, en tout cas celles qui viennent à Actions Traitements. Enfin, au niveau de l'information thérapeutique, nous proposons des outils adaptés pour les personnes vivant avec le VIH de plus de 50 ans. Nous avons lancé depuis quelques mois une série de brochures à destination de ces personnes. Après un premier document sur les aspects thérapeutiques, nous sortons une brochure autour de la vie affective et sexuelle des personnes vivant avec le VIH de plus de 50 ans. Et la troisième brochure qui devrait voir le jour d'ici la fin de l'année 2025 sera sur la santé mentale des personnes qui avancent en âge. L'étude Moi Patient a montré que la santé mentale des personnes de plus de 50 ans vivant avec le VIH se détériorait.

    Jean-Marc Bithoun : Au niveau des groupes d'autosupport, plusieurs questions et problématiques reviennent. L’une est la non-acceptation de la maladie. Certaines personnes n'attendent qu'une chose : c'est de guérir. Elles ne peuvent pas accepter le virus, leur séropositivité. Dans ces situations, nous parlons de l'avenir, de la recherche, des avancées, des perspectives, de tout ce qui permet d'améliorer le vécu de ces personnes. Mais certaines restent dans ce schéma de pensée. C’est important de le savoir car cela revient beaucoup, même sur la ligne d'écoute. La convivialité reste un enjeu important. Les gens sont demandeurs de liens, d’avoir des activités communes qui créent et renforcent ces liens. On peut citer celle de préparer un repas en commun. On y parle de nutrition, de recettes, de l’intérêt qu’il y a à mieux manger lorsqu’on est atteint du syndrome métabolique ou du diabète, ou qu’on modifie ses pratiques pour ne pas l’être.

    Remaides : Un des freins au fait de bien vivre avec ces traitements est la prise de distance par rapport aux soignants-es. Une des causes qui est souvent avancée ― et cela a d’ailleurs été une surprise de le voir si fortement dénoncé ― ce sont les discriminations dans le soin à l'encontre des personnes vivant avec le VIH. Est-ce que cela vous a surpris ? Et que préconisez-vous comme action contre ce phénomène ?
    Jean-Marc Bithoun :
    Je vais juste apporter mon témoignage. J'ai eu récemment une personne qui m'a contacté pour me dire qu'elle était hospitalisée et qu'une personne qui s'occupait d'elle, c'était une aide-soignante, je crois, avait refusé de lui faire sa toilette, expliquant : « J'ai appris que vous étiez séropositif. Je ne peux pas m'occuper de vous. Je ne veux pas transmettre le virus à mes petits-enfants. » Finalement, elle avait mis deux paires de gants. Nous avons fait une action auprès du représentant des usagers de l’établissement concerné. Ce type de comportements existe encore. Moi, je ne veux pas attaquer les gens qui ont ce genre de comportement. Je pense que c’est la conséquence d’un manque de formation et d'information. Pour moi, les gens qui rejettent, qui discriminent, ce sont des gens qui ne connaissent pas suffisamment le VIH. Dans ce cas, je n’y vois pas forcément quelque chose de méchant, mais plutôt le résultat d’une méconnaissance.

    Julia Charbonnier : C'est pour cela que nous agissons concrètement sur cette question à Actions Traitements. Cela fait maintenant plusieurs années que nous avons mis en place un annuaire de professionnels « sérofriendly », disponible sur notre site internet. Il recense les professionnels de santé, dans toute la France hexagonale et dans les Drom-Tom, qui peuvent accueillir sans discrimination, sans jugement, toute personne vivant avec le VIH. C'est d’ailleurs un long travail un peu chronophage et difficile, parce qu’il doit régulièrement être mis à jour. Nous avons aussi lancé des sessions de formation auprès de différentes écoles de santé, notamment des écoles dentaires où sont formés les futurs dentistes. On intervient également dans les instituts de formation en soins infirmiers et dans certaines écoles de pharmacie. Pour ces interventions, on essaie à chaque fois d'avoir trois personnes d’Actions Traitements ; un trio qui comprend une personne vivant avec le VIH qui pourra partager ce témoignage, un collègue ou une collègue d'Actions Traitements et enfin un ou une professionnelle de santé. Par exemple, pour les écoles dentaires, nous travaillons avec le Dr Xavier Fleuranceau, chirurgien-dentiste, qui nous accompagne maintenant depuis plusieurs années. Nous avons ainsi initié des partenariats avec certaines écoles dentaires, à Lille, Bordeaux, pour que notre module d’intervention soit intégré dans leurs parcours universitaires. Certains Corevih nous ont d’ailleurs soutenus, ce qui a facilité la mise en place de ces actions. On développe aussi des partenariats avec différentes structures professionnelles pour former et sensibiliser ces soignants. Par exemple, nous avons été récemment approchés par le collectif COSIVIH qui regroupe des infirmiers et infirmières voulant s’engager dans la lutte contre le sida. C’est important de se rapprocher de ce type de structures pour pouvoir former, sensibiliser et diffuser nos outils. Nous avons produit une campagne sur I = I, avec un volet numérique et une version papier qu’on souhaiterait pouvoir diffuser davantage au niveau national, cette année. Nous avons vraiment travaillé sur cette idée de « zéro risque de transmission, zéro raison de discriminer » ; et cela, en partant de différentes situations, par exemple : une personne dans un cabinet dentaire, pour les discriminations dans le soin. Enfin, on produit des outils d'information et des articles, notamment à destination du monde médical pour faire évoluer les pratiques. C'est un travail de fond qui nous semble essentiel et qu'on espère pouvoir encore poursuivre.

    Jean-Marc Bithoun : Je voulais ajouter la notion de sensibilisation. Dans les écoles où nous allons, nous avons à faire à des publics qui sont jeunes, qui rentrent dans la vie sexuelle. De mon point de vue, cela a un double impact : travailler sur les questions de discrimination, mais aussi faire comprendre ce que c'est que le VIH aujourd'hui, comment se protéger, l’intérêt du dépistage, etc. C’est un double objectif en une seule action. Cela amène notamment à réfléchir à son positionnement personnel dans le cas où l’on serait amené à rencontrer une personne séropositive…

    Remaides : On assiste aujourd’hui à une évolution du contexte dans le champ de la lutte contre le VIH et de la prise en soins : une dégradation dans de nombreux domaines, ce qui a un impact fort sur les besoins des personnes vivant avec le VIH. De nombreuses associations, comme la vôtre, avaient auparavant un champ d’action précis. Au fur et à mesure, votre champ d’action s’élargit et vous êtes sollicités sur de plus en plus de sujets. Par ailleurs, des structures spécialisées ne peuvent plus faire face parce que les demandes sont trop importantes, ce qui limite les possibilités d’orientation, enfin le contexte financier du monde associatif de la lutte contre le sida est très dégradé. Est-ce la situation que vous connaissez et, si oui, vous inquiète-t-elle ?
    Jean-Marc Bithoun :
    Je voulais juste dire que la notion d'éducation thérapeutique du patient, fait que, de toutes façons, on doit voir la personne dans sa globalité, puisqu'on sait très bien que les différents déterminants de santé (l’aspect social, la famille, le logement, etc.) vont aussi entraîner des conséquences sur l'observance. Nous sommes, d’une certaine façon, obligés de nous confronter à l’ensemble de ces éléments. Pour autant sur la ligne d'écoute de l’association, nous avons toujours et surtout parlé des traitements, mais quand on allait plus loin que ce seul sujet ; souvent, on s'apercevait que la question du traitement était un peu l’arbre qui cachait la forêt. Et quand on grattait un petit peu, d'autres problématiques se posaient. C’est vrai qu’il était plus facile alors d’orienter. De notre côté, nous avons aujourd’hui un programme d'accompagnement qui est beaucoup plus structuré, beaucoup plus vaste, plus complet, où l’on peut s'emparer des différentes problématiques. Il reste encore des domaines où nous orientons, c’est le cas des structures qui font de l'hébergement, qui ont développé des programmes d’appartements de coordination thérapeutique (ACT) ou de logements d'urgence.

    Julia Charbonnier : Le panorama dépeint dans la question est très juste. Jean-Marc a parlé du programme d'éducation thérapeutique du patient qu'on propose. Nous avons l'agrément de l'Agence régionale de santé depuis 2012 pour mettre en œuvre ce programme. Nous sommes d’ailleurs la première association, hors milieu hospitalier, à l’avoir obtenu. Notre programme a énormément évolué ces derniers temps. Jean-Marc a raison, l'éducation thérapeutique du patient, c'est normalement prendre en compte les différents champs de la santé de la personne vivant avec le VIH ; donc la définition classique de l'Organisation mondiale de la santé [voir encart ci-dessous]. Cependant, nous observons une grande précarisation des personnes vivant avec le VIH et une augmentation des fragilités des personnes qui vivent avec le VIH. Il y a quatre ans, nous n’avions pas d'assistante sociale ni de juriste au sein de l'association. À cette période, nous avions bien sûr un programme d’ETP [éducation thérapeutique du patient, ndlr] dans lequel on essayait au maximum de travailler les questions psychologiques, thérapeutiques, d’autant que nous pouvions nous appuyer sur une psy. Pour les demandes de nature sociales ou juridiques, on essayait d'orienter au maximum vers d'autres associations, comme Arcat, Basiliade ou Act Up-Paris, qui, depuis de nombreuses années, proposaient ce type de services.
    Malheureusement, toutes les associations sont saturées. Par ailleurs, cela devenait difficile pour nous de travailler sur le thérapeutique, la gestion des émotions, même autour de la vie affective et sexuelle des personnes, si on ne répondait pas aux besoins premiers et vitaux des personnes qui venaient à l'association. Nous nous sommes retrouvés dans l'obligation d’élargir notre champ d’action, notre offre. J’ai d’ailleurs dû aussi l’expliquer aux financeurs, pour qu'ils comprennent pourquoi nous proposions désormais ce type d'accompagnement. Nous étions dans l'obligation de le faire, si nous voulions vraiment réussir à travailler l'ETP, pure et dure, dans l’intérêt de la personne, et dans l’objectif de renforcer ses compétences. Aujourd’hui, il y a une précarisation accrue des personnes et une saturation des associations. C’est d’ailleurs presque notre cas.
    Les parcours de vie des personnes sont particulièrement complexes et nécessitent une approche globale menée en réseau. Nous proposons un accompagnement global, mais la complexité de certaines situations est telle qu’elle nécessite que nous ayons des dossiers en commun avec d'autres associations. Ils bénéficient ainsi de davantage de compétences et d’un accompagnement qui s’appuie sur la complémentarité. Mais ce qui m’inquiète, c’est la chute de nos ressources financières. Nous sommes saturés par les demandes concernant des personnes vivant avec le VIH de plus en plus précaires, avec des parcours de vie complexes, des vulnérabilités qui se cumulent, une santé mentale fragile, etc., et les moyens des associations diminuent. C'est inquiétant. D’autant que c'est la même situation pour de nombreuses associations. Les ressources ne sont pas assez suffisantes pour fournir le travail nécessaire pour toutes les personnes qui en ont besoin et pourtant nous faisons le maximum.

    La ligne d'écoute d'Actions Traitements
    06 66 45 47 03 : la ligne d'écoute d’Actions Traitements par message Whatsapp
    La ligne d'écoute et d'information (06 66 45 47 03) est ouverte du lundi au vendredi de 10h à 18h.  Il est recommandé de la contacter par message Whatsapp, vous serez ensuite rappelé-e. Les bénévoles de l’association sont là pour vous écouter, vous conseiller, vous orienter et répondre à toutes vos questions, qu'elles concernent la vie avec le VIH, les traitements ARV, les bilans biologiques, les co-infections, les interactions médicamenteuses ou la prévention du VIH, la Prep, le TPE et les modes de transmission, etc.
     

    La prévention biomédicale du VIH
    Le port du préservatif (interne ou externe) lors de rapports sexuels, l’emploi de matériel à usage unique pour les personnes usagères de drogues, etc. sont des moyens de prévention très efficaces. Les antirétroviraux utilisés chez les personnes exposées viennent compléter l’arsenal de ce qu’on appelle la prévention combinée. Le traitement comme prévention chez les personnes vivant avec le VIH (Tasp) est un outil clef de la prévention. Une personne séropositive sous traitement antirétroviral efficace donc avec une charge virale très basse, dite indétectable, ne transmet pas le VIH. C’est sur cette équation « virus indétectable = virus intransmissible » que se fonde l’approche « Tasp » – pour treatment as prevention. Cette stratégie est extrêmement efficace. On parle de prévention biomédicale avec la Prep (prophylaxie pré-exposition). La Prep est un traitement antirétroviral pris pour éviter d’être infecté par le VIH. Elle est destinée aux personnes séronégatives, avant une exposition au virus. Ce mode de prévention est très efficace. Le TPE (traitement post exposition ou traitement d’urgence) fait également partie de la prévention biomédicale.

    Le colloque annuel d'Actions Traitements en 2024

    Le 7 novembre 2024, Actions Traitements avait organisé son colloque annuel. Le thème retenu : « VIH : une épidémie invisibilisée, des vies invisibles ». L’ Actu vue par Remaides y a consacré deux articles. Voici le premier et voici le second.

    La littératie en santé

    « La littératie en santé est reconnue être un élément déterminant de la santé publique. On entend par ce terme la motivation et les compétences des individus à accéder, comprendre, évaluer et utiliser l'information en vue de prendre des décisions concernant leur santé », explique une publication de Santé publique France. « Le niveau de littératie en santé est préoccupant, notamment en Europe et y compris en France », rappelait Stephan Van den Broucke, dans La Santé en action (2017, n°. 440, p. 11-13). Et d’expliquer : « Améliorer le niveau de littératie est un enjeu majeur de santé publique pour que la population ait la capacité de prendre en charge au mieux sa santé. Il s'agit aujourd'hui de mettre en œuvre des actions pour renverser cette situation : décrypter les mécanismes qui ne permettent pas d'accéder à un niveau de littératie suffisant, prendre en compte cette préoccupation dans les politiques publiques, veiller à créer des environnements qui incluent les faibles niveaux de littératie en santé et, aussi, assurer une meilleure communication sur la santé. Un effort important de recherche au niveau international doit être entrepris pour hausser le niveau de littératie du plus grand nombre. »

    La définition de la santé de l'Organisation mondiale de la Santé

    « La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité », explique l’OMS. De son côté, la HAS (Haute autorité de santé) a publié un texte qui explique ce que sont les « principaux déterminants de la santé ». Ils comprennent :
    - le revenu et le statut social ;
    - l'emploi et les conditions de travail ;
    - l'éducation et la littératie ;
    - les expériences vécues pendant l'enfance ;
    - l'environnement physique ;
    - le soutien social et la capacité d'adaptation ;
    - les comportements sains.