L’Actu vue par Remaides : « Un pas en avant vers la guérison du VIH, mais la route reste longue »
- Actualité
- 10.06.2025
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Par Fred Lebreton
Un pas en avant vers la guérison du VIH, mais la route reste longue
Pour la première fois, des scientifiques sont parvenus à localiser le VIH dans ses cachettes cellulaires les plus inaccessibles, grâce à une technologie innovante issue de l’ARN messager. Une avancée majeure qui permet de visualiser le virus là où les traitements échouent aujourd’hui à l’atteindre. Mais cette découverte, aussi prometteuse soit-elle, n’est encore qu’un pas sur une route qui reste longue vers la guérison. Explications.
Une percée pour traquer le VIH dans ses cachettes cellulaires
C’est une avancée qui fait dire aux chercheurs-ses australiens-nes qu’ils-elles sont passés-es « du jour à la nuit ». À Melbourne, l’équipe de l’Institut Peter Doherty a franchi une étape jugée longtemps infranchissable : rendre visible le VIH, là où il se cache, à l’intérieur des globules blancs, un réservoir jusqu’ici intouchable par les traitements ou le système immunitaire. En utilisant une version modifiée de la technologie de l’ARN messager, rendue célèbre par les vaccins contre la Covid-19, les scientifiques ont conçu une nouvelle nanoparticule lipidique, baptisée LNP X, capable de pénétrer ces cellules réfractaires. Une fois introduit, l’ARNm agit comme un éclaireur (une lampe torche), révélant la présence du virus. Ce « tour de force biologique » est rapporté dans la revue scientifique Nature Communications, sur la base d’expériences menées sur des cellules issues de personnes vivant avec le VIH. « Cela ne fonctionnait pas auparavant, puis soudainement, ça marchait. Nous étions submergés [par la découverte, ndlr] », confie la Dre Paula Cevaal, co-autrice de l’étude, dans une interview accordée au Guardian. Pour la première fois, une stratégie montre concrètement comment faire sortir le virus de sa tanière, condition indispensable à son élimination. Mais cette révélation n’est qu’une partie du puzzle : reste à savoir si le système immunitaire peut détruire les cellules infectées ainsi exposées, ou s’il faudra recourir à d’autres traitements combinés pour y parvenir.
« Beaucoup d’approches prometteuses n’arrivent jamais jusqu’aux patients »
L’emballement n’est toutefois pas de mise et attention aux effets d’annonces médiatiques. Cette découverte, aussi spectaculaire qu’elle soit, reste aujourd’hui confinée à l’échelle des éprouvettes. Il faudra des années avant que cette technologie puisse être testée sur l’humain, en passant par les indispensables étapes de validation chez l’animal, puis des essais cliniques chez l’humain. La Dre Cevaal prévient : « Dans la biomédecine, beaucoup d’approches prometteuses n’arrivent jamais jusqu’aux patients. ». Des voix s’élèvent pour appeler à la prudence, à l’instar du Pr Tomáš Hanke de l’université d’Oxford, qui relativise la difficulté à introduire l’ARNm dans les globules blancs et juge prématuré l’espoir d’atteindre toutes les cellules où le VIH se tapit. De son côté, le Dr Jonathan Stoye, rétrovirologue britannique, salue une avancée « majeure » tout en rappelant une inconnue de taille : quel pourcentage du réservoir viral faut-il vraiment éliminer pour parler de guérison ? Une interrogation partagée par Matthew Hodson, ancien directeur général du site d’infos Aidsmap et de Gay Men Fighting AIDS dans un post publié sur le réseau Bluesky : « La capacité du VIH à se cacher dans l’organisme est l’une des raisons pour lesquelles une guérison reste si difficile à trouver. Cette avancée représente un progrès significatif, mais elle ne fait qu’ouvrir la voie vers un traitement curatif, ce n’est pas encore une guérison. C’est une bonne nouvelle mais inutile de sabrer le champagne trop vite, le chemin reste encore long. ». Une bonne nouvelle donc, mais la prudence et la patience restent de mise.