L'Actu vue par Remaides : Marche des Fiertés 2025 : Paris en tête d’affiche
- Actualité
- 07.06.2025
Crédit photo : Journal L'humanité/Inter LGBT
Jean-François Laforgerie et Fred Lebreton
Marche des Fiertés 2025 : Paris en tête d'affiche
Le 3 juin dernier, le quotidien L’Humanité a publié sur sa une l’affiche de l’édition 2025 de la Marche des Fiertés parisienne. L’illustration retenue a rapidement fait l’objet de vives critiques, notamment de la part du Beit Haverim, groupe juif gay et lesbien de France. La polémique a enflé avec des réactions au gouvernement, chez des députés-es et formations politiques, des annonces de retraits de logos officiels et le non-versement d’une subvention à l’association organisatrice de l’événement, l’Inter-LGBT, de la part de la région Île-de-France. Explications.
En fin d’article, d’autres infos LGBT+
Sur le visuel de la marche annuelle en défense des droits des personnes LGBT+, prévue le 28 juin, figurent sept personnages, dont un portant le voile et brandissant une pancarte « Contre l’internationale réactionnaire ». Un autre personnage arbore un triangle rose (le symbole cousu par les nazis sur les uniformes des détenus homosexuels dans les camps) et un autre personnage plusieurs pin’s et un sac avec, prétendument, le drapeau palestinien. « Le sac n'a "rien à voir avec la Palestine, il représente le drapeau de la Hongrie et le drapeau de la Bulgarie où les prides sont interdites actuellement", a indiqué le président Alexandre Schon de l’Inter-LGBT. Les pins "représentent la convergence des luttes à laquelle l'Inter-LGBT est attachée".»
Au premier plan, un homme en noir et blanc semble avoir été mis K.-O.
La publication de cette affiche a notamment suscité l’indignation du groupe juif gay et lesbien de France, Beit Haverim, qui a dénoncé « l’inclusion » sur le visuel des « couleurs du drapeau palestinien » et critiqué des « choix de communication irréfléchis » à même de déclencher « des débordements ou des actes d’hostilité ». « L’inclusion » des « couleurs du drapeau palestinien » constitue « une instrumentalisation politique qui engage l’ensemble des structures sans leur consentement explicite », affirme le Beit Haverim dans un communiqué, cité par l’AFP. D’autres critiques ont émané de plusieurs élus-es de droite et d’extrême droite.
Du côté de l’inter-LGBT, on affirme que l’affiche « représente le drapeau de la Hongrie et le drapeau de la Bulgarie où les prides sont interdites actuellement » et on critique des « contresens grossiers ». Dans ce visuel, « l’artiste a voulu représenter des personnes queers unies face à une internationale réactionnaire qui tue des personnes LGBT, les empêche de s’exprimer, restreint leur droit à exister, à s’aimer et à s’autodéterminer », a expliqué Alexandre Schon, président de l’Inter-LGBT, interrogé par l’AFP. « On a des milliers de nos camarades qui sont en train de mourir aujourd’hui, il est vital que ce mot d’ordre ne soit ni détourné politiquement ni réapproprié sur la base de contresens. »
Peine perdue, si on en croit la masse des réactions hostiles au visuel et à la diffusion de cette affiche. Sur X, la présidente de la région Île-de-France Valérie Pécresse (Les Républicains) a dénoncé une affiche qui incite « à la violence avec son cadavre renversé » et a donc annoncé avoir demandé le « retrait » du logo de la région, complété d’une décision de ne pas verser la subvention. La prise de position de Valérie Pécresse lui a attiré les foudres du sénateur communiste de Paris, Yann Brossat : « Honte à Mme Pécresse qui retire sa subvention à l’Inter LGBT mais maintient ses subventions facultatives à Stanislas dont les dérives anti-républicaines sont innombrables.
Soutien à l’@InterLGBT, cible d’une campagne scandaleuse ». « Quelle honte.
Cédant à une campagne d'extrême droite, Valérie Pécresse coupe la subvention de la région », a également réagi sur X Clémence Guetté, vice-présidente de l’Assemblée nationale et députée LFI.
Des réactions à droite et à l’extrême droite
« Fut un temps pas si lointain où « la Marche des fiertés » était un moment de gaieté, tantôt populaire, tantôt gentiment snob, dans laquelle tous ceux qui le souhaitaient pouvaient venir témoigner d’un soutien contre les haines, les discriminations mais aussi contre l’indifférence face à l’épidémie de sida. Comme tout ce que touche l’extrême gauche, c’est désormais un cloaque de gens aigris qui détestent tout le monde, y compris, voire surtout, tous ceux qui aiment la France.
Femme voilée, homme blanc martyrisé et caricaturé en facho, soutien à la Palestine, alors que les homos, bis et trans y sont massacrés… voilà les marqueurs d’extrémistes qui se moquent des violences bien réelles que subissent les homos en France comme tant d’autres Français.
La liberté, l’égalité et la fraternité méritent mieux. Evidemment, la joie reviendra » a commenté Sébastien Chenu, député RN, et vice-président du parti d’extrême droite. Le député RN Julien Odoul a aussi fait une publication sur X avec le sens de la modération qu’on lui connaît : « Homme blanc étranglé, femme voilée, soutien au #Hamas… Cette marche des fiertés est la déambulation de la honte et de la haine de tout ce qui n’est pas l’extrême gauche. Rappelons que le seul pays de la région qui permet d’aimer librement s’appelle #Israel ». De toute évidence, on avait, à l’extrême droite, bien organisé sa réaction, car Jean-Philippe Tanguy, député RN et soutien indéfectible de Marine Le Pen s’est, lui aussi, fendu d’un message sur X. Vous l’avez déjà lu… c’est mot pour mot, celui publié par Sébastien Chenu.
Gouvernement, Dilcrah : les instances officielles s’en mêlent
« À la demande de la Ministre @auroreberge [Aurore Bergé, ministre chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les Discriminations), nous avons demandé que la DILCRAH ne soit en aucun cas associée à cette affiche et que notre logo en soit retiré.
La lutte contre la haine LGBT+ ne saurait passer par l’incitation à la violence ou à la haine » a réagi la Dilcrah (délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine-anti-LGBT+) sur X. « Ça n’est rien d’autre que de l’incitation à la violence, cette affiche montre l’extrême "gauchisation" des associations organisatrices. Si l’objectif est de diviser, c’est réussi », a commenté auprès de l’AFP, l’entourage du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau. L’association FLAG !, créée par des policiers-ères et fonctionnaires de justice LGBT et associée à l’organisation de la marche, s’est « désolidaris(ée) totalement de cette affiche » dont elle a demandé le « retrait immédiat ».
Des réactions de soutien à l’Inter-LGBT à gauche
Un des premiers à réagir a été Jean-Luc Mélenchon. « Soutien à la Marche des fiertés et l'@InterLGBT !
Il s'agit du droit de maîtriser sa propre existence. Rien de plus, rien de moins. Les pressions et les menaces de l'extrême droite, prétendent faire renoncer des personnes à être elles-mêmes. Nous ne céderons pas.
RDV le 28 juin dans la rue pour la #marchesdesfiertes à Paris ! », a écrit sur X, le leader de la France Insoumise ». Députée (Écologiste et Social), l’ancienne élue LFI Danielle Simonnet a écrit sur X : « Scandaleux : sous la pression de l'extrême-droite, Valérie Pécresse a décidé de retirer la subvention de la région Ile-de-France à la Marche des fiertés ! Total soutien à l' @interlgbt.bsky.social. Soyons très nombreuses et nombreux à la Marche des fiertés à Paris le 28 juin ! ».
Des personnalités de la lutte contre le sida et la défense des droits des LGBT+ ont réagi. Sur Instagram, Hugues Charbonneau a expliqué : « Si cette affiche vous dérange, vous n’avez rien à faire dans nos marches. C’est simple. Nos marches sont nées dans la violence, dans l’affrontement physique contre le pouvoir politique, contre des lois oppressives, pour nos droits, pour nos vies. Ne venez pas marcher, restez sur vos chaises à regarder tomber les bombes. »
Le ni oui, ni non de la mairie de Paris !
Maire (PS) de Paris centre, Ariel Weil est un des premiers élus à avoir réagi en épousant les critiques contre l’affiche. Il a ainsi expliqué sur X : « Entièrement d’accord avec la vision soutenue par @FiertesC @ADFH_asso @BeitHaverim @flagasso et bien d’autres de la lutte pour les droits : laïque, universaliste, féministe et antiraciste. L’affiche de la Marche est problématique à cet égard et ne nous engage pas en tant qu’alliés ».
« On peut bien sûr contester l’affiche qui a été choisie par un vote des associations membres de l’@interlgbt. Mais supprimer les crédits de sécurisation à la Marche (comme le fait la région @iledefrance) ferait courir de très graves risques à cette Pride à un moment où les personnes LGBTQIA+ font l’objet d’attaques extrêmement graves partout dans le monde ! » a commenté sur Instagram, Jean-Luc Romero-Michel, adjoint à la maire de Paris en charge des droits humains, de l'intégration et de la lutte contre les discriminations. Et l’élu de poursuivre : « Paris ne cautionne évidemment pas cette affiche, mais est plus que jamais aux côtés des associations organisatrices de la Marche parisienne au moment où les attaques LGBTQIAphobes explosent partout et alors qu’au sein même de notre Europe, le président homophobe Orbán interdit la Marche de #Budapest.
La violence que subissent actuellement les personnes LGBTQIA+, et particulièrement les personnes trans, mérite une mobilisation de toutes et de tous. Paris ne se trompe pas de combat et se veut plus que jamais une ville-refuge ! Pour mettre fin aux polémiques, Paris est à la disposition de l’InterLGBT pour permettre une meilleure concertation avec les partenaires qui ont pu être choqués par l’affiche, afin d’aplanir les incompréhensions et faciliter la concertation en amont à l’avenir. Cela ne saurait pour autant occulter la nécessité de se battre contre la hausse des LGBTQIA+phobies : quelles que soient les divergences d’approche, nous devons lutter ensemble et donc être dans la rue le 28 juin prochain ! ».
En bref, d'autres infos LGBT+
Journée contre l’homophobie et foot : trois joueurs de Ligue 1 sanctionnés pour leur comportement
Chaque année, une journée de rencontres de football de la ligue 1 est placée sous le signe de la Journée internationale contre l’homophobie. À cette occasion, il est demandé aux joueurs professionnels de porter sur leurs maillots un écusson spécial sur une manche de leurs maillots aux couleurs de l’arc-en-ciel de la communauté LGBT +. Chaque année, cette initiative pose problème à quelques rares joueurs. Cette saison, comme le rapporte l’AFP, plusieurs joueurs du championnat de France se sont signalés par des comportements contraires aux valeurs portées par l’événement. Trois d’entre eux, Jonathan Gradit (RC Lens), Nemanja Matic (Olympique lyonnais) et Ahmed Hassan (Le Havre AC) se trouvent aujourd’hui sanctionnés pour leur attitude lors de cette journée. C’est ce qu’a annoncé mercredi 4 juin la Ligue de football professionnel (LFP). L’Égyptien Ahmed Hassan et le Serbe Nemanja Matic avaient choisi de se désolidariser de cette opération en choisissant de recouvrir d’un sparadrap cet écusson. Ils ont écopé de deux matchs de suspension ferme et deux avec sursis ; ils ont accepté de participer dans un délai de six mois à une action de sensibilisation à la lutte contre l’homophobie dans le football. De son côté, le Français Jonathan Gradit a été suspendu un match ferme par la commission de discipline de la LFP pour avoir proféré une insulte homophobe à la mi-temps de la rencontre contre Monaco, cette même journée.
Hongrie : le vote de la loi ciblant ONG et médias reporté à l’automne
Pause. Il n’aura finalement pas lieu mi-juin : le vote de la loi hongroise visant à sanctionner les ONG et médias « financés depuis l’étranger » est reporté ; une décision qui intervient après de vives critiques internes et européennes. « Les débats sur ce projet de loi se poursuivront à l’automne », a déclaré mercredi 4 juin à l’AFP le groupe parlementaire du parti au pouvoir Fidesz, cité par l’AFP. Selon son président Mate Kocsis : « des organisations sérieuses en dehors des parties affectées » ont émis des remarques qui doivent être examinées. Des critiques en interne dans la majorité ont également été formulées, selon des informations de presse. Le texte sur « la transparence de la vie publique », déposé mi-mai, a été condamné par la Commission européenne, tout comme par des centaines d’ONG et de médias. Plusieurs manifestations ont également eu lieu à Budapest ces dernières semaines pour protester contre ce futur texte. Dans une lettre rendue publique mercredi 4 juin, le commissaire aux Droits humains du Conseil de l’Europe, Michael O’Flaherty, a, de nouveau, demandé aux parlementaires de ne pas l’adopter, s’inquiétant de son impact sur les droits et libertés fondamentales. Selon le gouvernement de Viktor Orban, qui a progressivement mis au pas les contre-pouvoirs au nom d’une politique « illibérale » depuis son retour en 2010, il s’agit de démanteler « des réseaux de propagande » financés par des fonds étrangers et influant sur le processus électoral.
Concrètement, tout organisme « menaçant la souveraineté de la Hongrie en utilisant des fonds étrangers pour influencer la vie publique » pourra être placé sur liste noire. A la clé, de possibles amendes et l’impossibilité de bénéficier des donations de contribuables, essentielles à la survie de nombreux médias indépendants.
Sont visées les organisations « violant ou critiquant » les valeurs inscrites dans la Constitution, notamment « la primauté du mariage, de la famille et des sexes biologiques », ou encore « l’unité de la nation hongroise ». Si ces règles sont enfreintes, de lourdes amendes seront infligées, pouvant atteindre 25 fois le montant de l’aide financière reçue, avec menace d’interdiction des activités en cas de récidive. Soit une façon de museler médias et une bonne partie des corps intermédiaires.
Droits LGBT : une loi hongroise viole le droit européen, selon une avocate générale
Avis tranché. Une loi hongroise de 2021 restreignant l’accès aux contenus LGBT dans les médias ou les librairies, sous le prétexte de vouloir protéger les personnes mineures, « viole le droit de l’Union européenne », a estimé jeudi 5 juin une avocate générale auprès de la Cour de la justice de l’Union européenne. Dans cet avis, la magistrate Tamara Capeta est censée éclairer la juridiction de Luxembourg, dont l’arrêt n’est pas attendu avant plusieurs semaines. L’avocat générale estime que les modifications apportées en 2021 à la législation hongroise pour limiter l’exposition des enfants à ces questions relèvent d’« ingérences injustifiées ». « La Hongrie n’a pas apporté la preuve que le contenu dépeignant les vies ordinaires des personnes LGBTI risque potentiellement de nuire au développement sain des mineurs », stipule son avis, qui a fait l’objet d’un communiqué de la Cour. « En interdisant ou en restreignant l’accès aux contenus LGBTI, la Hongrie a violé le droit de l’Union », est-il souligné. Ce litige constitue un des plus emblématiques bras de fer sur le thème des droits humains opposant le gouvernement hongrois du nationaliste illibéral Viktor Orban à ses partenaires de l’UE. Au total seize pays membres de l’Union, dont la France et l’Allemagne, ainsi que le Parlement européen se sont joints à l’action en justice intentée par la Commission. Bruxelles avait annoncé cette saisine de la CJUE en juillet 2022. Depuis l’entrée en application de la loi hongroise, il est interdit aux médias audiovisuels de diffuser du contenu LGBT pendant la journée et aux magasins de vendre des produits sur le thème LGBT dans un rayon de 200 mètres autour des églises et des écoles. Certaines librairies ont été condamnées à des amendes pour avoir diffusé des romans graphiques et d’autres titres comportant des personnages LGBT dans leurs sections Jeunesse, selon l’ONG Reclaim, qui défend ces minorités sexuelles. Dans ses conclusions, Tamara Capeta demande à la Cour de justice de l’UE de constater que le droit de l’Union a été violé « à trois niveaux différents » : concernant une directive sur le commerce électronique, le Règlement général sur la protection des données (RGPD), et enfin la Charte des droits fondamentaux de l’UE. Une condamnation de Budapest dans ce dossier pourrait entraîner une lourde amende et potentiellement déclencher une procédure visant à suspendre les droits de vote de la Hongrie aux réunions des Vingt-Sept. La sortie de cet avis s’inscrit dans un contexte particulier. Le mois dernier des eurodéputés-es issus-es de la droite, de la gauche et du centre ont appelé la Commission à geler tous les fonds destinés à la Hongrie en raison des multiples textes jugés liberticides, dont celui visant à interdire la marche des Fiertés prévue fin juin à Budapest. Ce projet s’appuie en partie sur la loi de 2021 attaquée devant la CJUE.