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    L'actu vue par REMAIDES : "Mieux lutter contre la transmission du VIH et des hépatites virales chez les personnes qui consomment des drogues"

    • Actualité
    • 28.03.2024

    Par Jean-François Laforgerie et Fred Lebreton 

    Mieux lutter contre la transmission du VIH et des hépatites virales chez les personnes qui consomment des drogues

    Un appel de l’Onusida à « mieux lutter contre la transmission du VIH et des hépatites virales chez les personnes qui consomment des drogues » ; Meta soupçonné de faciliter et profiter de ventes illégales de médicaments aux États-Unis ; Lutte contre le tabac : l'Organisation mondiale de la santé annonce la création d'un fonds mondial ; Crack à Paris : des associations agissent en justice contre «  la répression arbitraire des consommateurs » ; Sevrage tabagique : une étude confirme l’efficacité de la e-cigarette ; Drogues : Macron veut des opérations anti-drogue « XXL » partout en France… les nouvelles sur les produits et leurs consommations n’ont pas manqué ces dernières semaines. La rédaction de Remaides fait le point.

    Onusida : mieux lutter contre la transmission du VIH et des hépatites virales chez les personnes qui consomment 

    À l’occasion de la 67e réunion de la Commission des stupéfiants des Nations Unies qui s’est récemment tenue à Vienne, l’Onusida a appelé à « l'intensification urgente des services de prévention des nouvelles infections par le VIH et l'hépatite virale chez les personnes qui consomment des drogues ». Dans un message vidéo adressé aux délégués-es de la Commission, la directrice exécutive de l'Onusida, Winnie Byanyima, a félicité certains pays pour les progrès réalisés dans « la mise en œuvre de programmes fondés sur des données probantes », et a appelé à une « action plus audacieuse ». « En tant que dirigeants, vous pouvez tenir l'engagement commun de mettre fin au sida en tant que menace pour la santé publique d'ici 2030 — si tous les individus peuvent bénéficier des services de prévention, de dépistage, de traitement et de soins du VIH dont ils ont besoin. Pour mettre fin au sida, nous devons veiller à ce que personne ne soit exclu », a-t-elle déclaré. L’enjeu actuel est de poursuivre les « progrès accomplis » dans le « rééquilibrage de la politique en matière de drogues en faveur de la santé publique ». Plusieurs pays ont adopté une approche de la consommation de drogues davantage axée sur la santé publique, et certains, comme le Ghana, ont décriminalisé toute consommation personnelle de drogues. Au Kenya, en Tanzanie et en Ouganda, les groupes de pairs-es ont joué un rôle essentiel dans les interventions de réduction des risques, les sessions de formation des forces de l'ordre et les initiatives de sensibilisation. Mais, note Winnie Byanyima, « les progrès restent fragmentaires. Des services tels que les programmes d'échange de seringues et la thérapie d'entretien aux agonistes opioïdes, essentiels pour réduire le VIH et d'autres risques pour la santé chez les personnes qui s'injectent des drogues, n'existent que dans environ 50 % des pays ».

    En 2019, l'Onusida a indiqué que seulement 1 % des personnes qui s'injectent des drogues avaient accès aux services de réduction des risques recommandés et, depuis lors, aucun autre pays n'a déclaré avoir atteint les niveaux de couverture recommandés. Un des principaux obstacles à ces progrès, sont les lois et les politiques qui continuent d'exacerber l'exclusion. L’enjeu est d’autant plus important, que les personnes qui consomment des drogues sont, aujourd'hui, sept fois plus susceptibles de vivre avec le VIH que les autres adultes. La possession de drogue pour usage personnel est encore criminalisée dans 145 pays, dont 34 maintiennent la peine de mort. « Nous savons que la prohibition des drogues a échoué. Les lois répressives sur les drogues et les pratiques d'application de la loi créent des obstacles importants à l'accès des personnes qui s'injectent des drogues à toute une série de services, ce qui augmente leur risque de contracter le VIH et réduit leur accès aux services », a commenté Christine Stegling, directrice exécutive adjointe de l'Onusida, présente à la réunion de Vienne. « Pour protéger la santé publique, nous devons décriminaliser la possession de drogues pour usage personnel, nous devons accroître considérablement l'offre de services de réduction des risques et nous devons nous assurer que les communautés de personnes qui consomment des drogues disposent de ressources suffisantes et qu'elles jouent un rôle de premier plan dans la riposte ».

    Etats-Unis : Meta soupçonné de faciliter et profiter de ventes illégales de médicaments

    Procédure. Le groupe Meta et ses plateformes (Instagram, Facebook) sont soupçonnés de faciliter et de profiter de ventes illégales de médicaments, ce qui a conduit des procureurs-es fédéraux à ouvrir une enquête pénale en 2023, explique un article du Wall Street Journal, publié mi-mars. Le quotidien économique américain, citant des sources proches, précise que des assignations à comparaître et des interrogatoires ont été effectués dans le cadre d’une procédure devant un grand jury, composé de citoyens-nes qui participent à la phase d’instruction. Ces derniers-ères doivent déterminer si les plateformes de Meta « facilitent et profitent de la vente illégale de médicaments » et doivent par conséquent être poursuivies en justice, explique le Wall Street Journal, qui affirme avoir consulté des assignations distribuées en 2023. Des procureurs-es de l’État de Virginie « ont réclamé des archives liées à des contenus sur des médicaments en infraction (avec la réglementation) sur les plateformes de Meta et/ou sur la vente illégale de médicaments via les plateformes de Meta ». L’Agence américaine des médicaments (FDA) apporte un soutien à cette enquête fédérale, ajoute le quotidien.

    « Meta coopère de manière proactive avec les forces de l’ordre pour aider à combattre la vente et la distribution illégales de médicaments », a affirmé une porte-parole. De son côté, Nick Clegg, président des affaires internationales de Meta, a posté, mi-mars, sur X (ex-Twitter) que le groupe avait rejoint l’Alliance pour prévenir les dangers des médicaments, aux côtés notamment du département d’Etat américain et de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNDOC). L’objectif est, en particulier, « d’aider à empêcher la vente de drogues synthétiques sur internet », a-t-il expliqué, relevant que la crise des opiacés constituait un « problème majeur de santé publique » aux États-Unis. Selon les données des Centres de prévention et de lutte contre les maladies (CDC) américains, plus de 700.000 personnes ont succombé entre 1999 et 2022 aux Etats-Unis à une overdose liée à la prise d’opiacés, obtenus sur ordonnance ou de manière illégale.

    Lutte contre le tabagisme : l'OMS annonce la création d'un fonds mondial

    Un avancée mondiale dans la lutte contre le tabagisme. Il y a quelques jours, un accord sur la création d'un fonds mondial pour financer la lutte contre le tabac a été trouvé. Ce fonds de 75 millions de dollars, abondé par des pays donateurs sous forme de prêts sans intérêt, sera géré par la Banque mondiale, a déclaré Adriana Blanco, responsable du secrétariat de la Convention-cadre de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) pour la lutte antitabac (CCLAT), indique l’AFP. « Il s'agit d'un moyen novateur de générer des ressources pour aider à financer la mise en œuvre des accords internationaux de lutte contre le tabagisme », a-t-elle souligné lors d'une conférence de presse. Selon l'OMS, le tabac tue chaque année plus de huit millions de personnes dans le monde, dont 1,3 million de fumeurs-ses passifs-ves. La conférence a également débouché sur un engagement à renforcer la lutte contre le commerce illicite du tabac. La convention-cadre, en vigueur depuis 2005, compte 183 signataires, tandis que le protocole, en vigueur depuis 2018, n'en compte que 68, pointe l’AFP. « Nous envisageons un capital de 25 millions de dollars pour le protocole et un capital de 50 millions de dollars pour la convention-cadre, qui seront gérés ensemble », a expliqué Adriana Blanco. Environ 10 % du marché mondial des cigarettes est illicite, mais dans certains pays, ce chiffre dépasse 50 %, selon les estimations de l'Organisation panaméricaine de la santé (OPS).

    Crack à Paris : des associations agissent en justice contre "la répression arbitraire des consommateurs"

    Jeudi 14 mars 2024, plusieurs associations (Oppelia, Safe, Fédération Addiction, Association Addictions France et Gaïa Paris) ont déposé un recours pour faire annuler les arrêtés du Préfet de police qui interdisent la voie publique aux personnes ayant « un comportement d'usager de crack », explique un communiqué commun. « Les arrêtés récurrents et disproportionnés de la Préfecture de police de Paris « portant interdiction des regroupements d’usagers de cocaïne base dans certains secteurs de Paris et de la Seine-Saint-Denis » entravent le travail de réduction des risques et constituent une atteinte sérieuse à la liberté et à la dignité des personnes consommatrices de drogues les plus précaires ou supposées comme telles »,  souligne le communiqué. « C’est à l’aune des difficultés dans l’exercice de nos missions, que nous (associations, collectifs de riverains, citoyens concernés…) engageons un recours en annulation en justice ».

    Les associations signataires rappellent que, depuis juin 2023, le Préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, a engagé « une action policière de voie publique en prenant une série d’arrêtés spéciaux portant interdiction des regroupements d’usagers de cocaïne base dans certains secteurs de Paris et de la Seine-Saint-Denis. Le dernier est celui du 19 février 2024 (…) Ces arrêtés énoncent un inventaire de lieux où sont interdits les regroupements des usagers de cocaïne base et dont le périmètre s’agrandit petit à petit », explique le communiqué. Du côté des associations, on estime que ce sont « le droit fondamental à la protection de la santé et le droit à la vie auxquels il est porté une atteinte grave et manifestement illégale, ce qui justifie un recours en référé-liberté afin de répondre à l’urgence de la situation et un recours pour excès de pouvoir afin que la position de la Préfecture de Paris soit condamnée au fond ». Le communiqué rappelle d’ailleurs les conséquences, que les associations jugent néfastes, de ces arrêtés : « une aggravation des conditions de vie des personnes usagères de drogues accentuant leurs vulnérabilités » ; « une montée en tension des riverains qui « héritent » de cette situation dans leurs lieux de vie » ; « une dégradation des conditions de travail des acteurs du soin ». Et le communiqué de conclure : « Depuis des années, le champ sanitaire et médico-social ainsi que des collectifs de riverains et d’usagers ne cessent de travailler afin d’apporter des diagnostics approfondis, de construire des démarches concertées et de proposer des plans d’actions réalistes afin de cheminer vers la résolution du problème public du crack à Paris. Il est temps que ces propositions soient entendues et mises en œuvre en lieu et place d’une politique de répression qui n’apporte ni sécurité aux riverains ni protection de populations déjà très fragilisées. Nous souhaitons donc que le travail mené par la Préfecture de Police de Paris s’articule et converge avec les missions de santé publique qui nous sont confiées ».

    Sevrage tabagique : une étude confirme l'efficacité de la e-cigarette

    Une étude menée en Suisse auprès de plus de 1 200 participants-es fumeurs-ses (randomisée et de phase 3) confirme que les produits de vapotage avec nicotine sont une aide efficace à l’arrêt du tabac, explique Le Quotidien du Médecin. « Le grand avantage est d’avoir évalué avec une grande précision les effets indésirables, la rigueur est comparable à celle des études d’enregistrement de médicaments », a précisé le Dr Ivan Berlin, pharmacologue des addictions à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (AP-HP) et l’un des co-auteurs-rices de l’étude, cité par le quotidien médical. Et Ivan Berlin de préciser : « La tolérance est très rassurante à six mois, il n’y a pas eu davantage d’événements sévères de type décès ou infarctus du myocarde dans le groupe e-cigarette par rapport au [groupe] contrôle ». Les résultats de cette recherche ont été publiés dans The New England Journal of Medicine. Le Quotidien du Médecin rappelle qu’en janvier dernier, une étude publiée dans le Jama Internal Medicine avait montré la supériorité du vapotage sur les chewing-gums de nicotine pour le sevrage. Comme l’explique le quotidien médical, pour être éligibles à l’étude suisse, les participants-es fumaient au moins cinq cigarettes depuis 12 mois et déclaraient vouloir arrêter. Des conseils à l’arrêt de la cigarette étaient prodigués à l’ensemble des participants-es ; le groupe intervention recevait gratuitement une cigarette électronique et les liquides, ainsi qu’un traitement optionnel par substitut nicotinique (non pris en charge), le groupe témoin un bon d’achat (environ 50 euros) utilisable pour n’importe quel motif, y compris des substituts nicotiniques. À six mois, le taux d’abstinence continue du tabac (critère principal, validation biochimique) depuis la date d’arrêt était de 28,9 % dans le groupe e-cigarette et de 16,3 % dans le groupe témoin, soit une augmentation des chances de sevrage de 77 %. Le pourcentage de sevrage tabagique dans les sept jours avant la visite des six mois était respectivement de 59,6 % et de 38,5 %. Les participants-es étaient âgés-es de 38 ans en médiane (28-52 ans), aux trois quarts en activité et la grande majorité (85 %) avaient déjà essayé d’arrêter. Quant à la tolérance, 25 participants (4 %) ont présenté un événement indésirable sévère dans le groupe e-cigarette et 31 (5 %) dans le groupe témoin.

    Drogues : Macron veut des opérations "XXL" partout en France

    Emmanuel Macron a effectué une visite surprise mardi 19 mars à Marseille, cité de la Castellane, pour le lancement de la première d’une dizaine d’opérations nommées « Place nette XXL » qui devraient s’étendre sur plusieurs semaines en France. « Le but, c’est d’essayer de détruire les réseaux et les trafiquants et que les quelques-uns qui vous rendent la vie impossible s’en aillent », a expliqué le chef de l’État aux habitants-es de ce quartier, deux semaines après le cri d’alarme de magistrats-es marseillais-es qui avaient demandé un « plan Marshall » pour sauver la deuxième ville de France du « narco-banditisme ». La situation de Marseille est très particulière. En 2023, la guerre de territoires entre gangs a causé 49 décès, dont quatre victimes collatérales, et 123 blessés-es. Cette sortie a été l’occasion d’un nouveau discours martial : « Oui, la drogue est notre ennemi » et les forces de l’ordre « vont pendant des semaines pilonner le territoire », a juré Emmanuel Macron, sans citer de ville précisément. À Marseille, pas moins de 900 policiers-ères, gendarmes et douaniers-ères ont été déployés-es. Un dispositif qui a permis l’arrestation de 98 personnes en deux jours, dont 71 ont été placées en garde à vue. Plus de 385 000 euros en liquide ou en avoirs, 8,7 kg de cannabis et 339 g de cocaïne ont été saisis. Le même jour, à l’Assemblée nationale, le Premier ministre Gabriel Attal était interrogé sur le sujet lors de la séance des questions au gouvernement. Il a commencé son intervention par cette formule : « La drogue est la mère de tous les vices » pour enchaîner sur ceci : « Je sais que vous partagez mon objectif : ne jamais laisser les trafiquants dormir tranquille. La loi se rappellera toujours à eux ; qu’ils sachent que la République viendra toujours les chercher. Nous continuerons, ce n’est qu’un début. D’autres opérations seront menées, que ce soit à Marseille ou ailleurs en France ». Évidemment, comme à chaque fois, la question de l’usage de produits n’a été abordée que sous l’angle de la répression et pas une seule fois sous l’angle de la santé et de la réduction des risques.