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    Remaides 93

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    Remaides 93Fatima, Félix, Kevin, Issa, Aziz, Bintou…

     

    Hypothèse 1 : Il y a beaucoup trop de bonnes fées autour du berceau et cela fait peur au bébé PrEP (1).
    Hypothèse 2 : La prophylaxie pré-exposition fait l'objet en France d'une course de lenteur.
    Hypothèse 3 : Les autorités de santé d'ici ne savent pas quoi faire de cette nouvelle et se pressent de ne pas s'engager. Des hypothèses, on pourrait en échafauder bien d'autres sans finalement trouver la raison profonde de l'inexcusable retard français à mettre en place la PrEP. Car, oui, ce retard est inexplicable et coupable. Ecartons de suite le manque de preuves scientifiques qui pourrait expliquer les tergiversations des autorités de santé. L'efficacité de la prophylaxie pré-exposition est largement démontrée par différentes études menées dans différents pays, y compris en France (ANRS-IPERGAY). Le niveau de preuve est tel qu'il est désormais indiscutable que la PrEP marche. Elle marche d'ailleurs si bien qu'elle fait ses preuves depuis des années maintenant à l'étranger : 2012 pour les Etats- Unis par exemple. Ecartons aussi l'argument du manque de pertinence de cette stratégie chez nous qui pourrait expliquer les atermoiements des autorités françaises. C'est tout le contraire, nous avons un besoin évident de cet outil de prévention. C'est incontestable lorsqu'on regarde les données épidémiologiques françaises, surtout celles concernant les hommes ayant des relations sexuelles avec d'autres hommes (HSH). Rappelons que la prévalence au sein de cette communauté est telle qu'un HSH a deux cents fois plus de risque de contracter le VIH qu'une personne de la population générale. Précisons au passage que la PrEP est un besoin pour d'autres personnes et groupes également très exposés au risque de contamination. Résumons : la PrEP marche, c'est scientifiquement prouvé… et la nouvelle ne date pas de la semaine dernière ; l'urgence est là ; un besoin est identifié par la quasi-totalité des acteurs de la lutte contre le sida et pourtant la décision officielle de mise en place n'est toujours pas prise… Faute de demande ? L'explication ne tient pas. La demande existe. Nous avons même contribué avec l'enquête Flash PrEP (1) à en montrer l'ampleur et la nature et à la faire connaître. Alors quoi ? Avançons une réponse : les autorités de santé ne sont pas à l'aise avec la PrEP et à défaut d'avoir le courage de décider, elles amusent le terrain en multipliant les demandes d'avis auprès de "Pierre, Paul, Jacques"… dans un calendrier à l'urgence toute modérée.

    De notre côté, nous avons saisi, il y a deux ans, l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) d'une demande de recommandation temporaire d'utilisation de Truvada en usage préventif. Elle y travaille encore et n'a toujours pas sorti son avis définitif. A croire qu'il est écrit à la plume d'oie ! L'Agence (quatre réunions sur le sujet en deux ans !) attendait que les experts français du VIH, coordonnés par le professeur Morlat et sollicités par la ministre Touraine, aient rendu leur avis. C'est fait (voir en page 16), mais cela n'a pas précipité pour autant la publication de l'avis de l'ANSM. Un avis qui, très probablement, dira la même chose que les experts français. Qu'on se comprenne bien, une telle décision doit nécessairement s'accompagner d'une réflexion, mais celle-ci ne peut pas durer des années. Nous n'avons pas le temps ! Rappelons que chaque mois plus de 500 personnes découvrent leur infection par le VIH en France. Combien de personnes pourraient l'éviter grâce à la mise en place effective de cette nouvelle offre en prévention ? Logiquement, les chiffres, le contexte français devraient frapper les esprits, ceux des décideurs notamment. Alors pourquoi jouer la montre ? Pourquoi ne pas précipiter le mouvement ? Sans doute parce que cette mesure fait l'objet de très fortes réticences notamment financières. Qui paiera la PrEP ? Personne ne sait et officiellement aucune structure n'est mandatée à ce jour pour y réfléchir. Il faudra donc attendre… encore. Que de temps perdu et pas seulement dans les structures officielles. Nous avions sollicité en 2014 la SFLS (3) afin qu'elle rédige des recommandations aux médecins susceptibles d'accueillir des utilisateurs de la PrEP hors essai. Notre volonté ? Limiter les risques d'un usage "sauvage" qui se développait. Refus ! Quelques mois plus tard, un groupe est finalement constitué à la SFLS qui, désormais, y travaille. Où en serions-nous aujourd'hui sans la pression associative ? Où en serons-nous en 2015, 2016, si nous ne maintenons pas cette pression ? Nous y travaillons pour contourner les effets de l'inertie actuelle, assurer un bon suivi des utilisateurs de PrEP hors cadre d'essais, rendre accessible la PrEP pour celles et ceux qui en ont besoin… On ne peut pas attendre éternellement "Pierre, Paul, Jacques". Nous ne pouvons plus. Nous devons agir pour Fatima, Félix, Kevin, Issa, Aziz, Bintou, etc. Et vite !

    Aurélien Beaucamp, président de AIDES

     

     

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    (1) : PrEP ou prophylaxie pré-exposition : il s’agit de proposer, de façon préventive, un traitement antirétroviral à une personne séronégative fortement exposée au VIH, afin de réduire son
    risque de contamination.
    (2) : Enquête Flash PrEP réalisée auprès de 3 024 personnes par AIDES en 2014.
    (3) : Société française de lutte contre le sida. 

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